Progressivité des apprentissages : analyser un document
Quelle place et quel statut accorder au document en situation de classe ?
Le programme rappelle que « l’enseignement associe des temps dédiés :
- à la transmission des connaissances par les professeurs et d’écoute active de la part des élèves ;
- à l’étude de sources, à l’analyse approfondie et critique de documents variés (cartes, textes, iconographie, vidéos…) et à la réalisation de croquis. »
La distinction ici n’est pas fortuite et mérite que l’on s’y attarde. Elle souligne en premier lieu l’importance de la parole du professeur dans la transmission des connaissances tout en lui laissant le soin de choisir par lui-même la forme qu’elle prendra : un récit peut être ou non appuyé sur des documents, le professeur peut ou non solliciter la participation des élèves mais ce temps dédié à la transmission des connaissances doit dans tous les cas maintenir l’attention des élèves, les inciter leur faire percevoir l’intérêt de rester à l’écoute et actif – ne serait-ce que dans la prise de notes – durant cette phase pour pouvoir réaliser les tâches énoncées dans le second temps.Les documents d'accroche visent précisément à capter l'attention et mobiliser les élèves autour d'une problématique. A titre d'exemple, les choix du Time comme "personnalité de l'année" en 1979, 1980 et 1981 permettent d'introduire le chapitre sur "la modification des grands équilibres économiques et politiques mondiaux.
Le temps de travail sur document est – en seconde, en première ou en terminale – un temps d’analyse, où l’élève doit être en capacité de comprendre le point de vue de l’auteur, de l’expliciter, de prendre du recul sur le contenu en le mettant en relation avec ce qu’il sait par ailleurs du sujet étudié. Le programme d’histoire considère que les points de passage et d’ouverture - qui, « associés au récit du professeur » confèrent à l’histoire sa dimension concrète – constituent des « moments privilégiés » pour travailler « l’étude critique de documents ».
Plusieurs scénarios pédagogiques se dessinent donc pour placer l’élève en situation d’analyse :
Scénario 1 : Donner à l’élève un certain nombre de clés de compréhension du contexte dans lequel s’insère le document pour lui permettre de comprendre le point de vue de l’auteur.
- Quelques rappels sur « la Chine de Mao : l’affirmation d’un nouvel acteur international » que le chapitre 2 du thème 2 propose de mettre en avant (Une nouvelle donne géopolitique : bipolarisation et émergence du tiers-monde)
- Proposer un bref récit du parcours de Deng Xiaoping jusqu’en 1979 : compagnon de marche de Mao à partir de 1927, son ascension rapide dans le comité central du PCC, ses désaccords avec la ligne directrice de Mao qu’il juge trop utopiste, sa disgrâce à partir de 1966 pendant la Révolution culturelle jusqu’en 1973 où il est rappelé en tant que vice-Premier ministre – et chef de l’état-major pour superviser le redressement de la situation économique. Il représente la Chine à l’ONU en 1974 et constate au fil de ses voyages diplomatiques le retard accumulé par la Chine sur les pays capitalistes dans les domaines économique et technologique. Ce portrait de l’auteur est utile à plusieurs titres : il permet d’éclairer le fondement de sa politique des « Quatre modernisations » autant que son impossibilité de rompre en totalité avec l’héritage de Mao au risque de se heurter à une multitude d’oppositions idéologique, bureaucratique et corporatiste à tous les niveaux. Il évite l’écueil de gommer les jeux d’acteurs derrière « la Chine » ou la figure d’un dirigeant tel que Deng Xiaoping.
- A la lumière de ces éléments, les élèves sont alors en mesure d’opérer une analyse des deux extraits de discours de Deng Xiaoping en répondant à la question : « Assiste-t-on en Chine à un basculement dans un système capitaliste ? ».
Scénario 2 : Amener les élèves à la confrontation de points de vue. Confronter deux documents complémentaires ou contradictoires pour appréhender une réalité complexe.
Choisir ses supports
En terminale il convient d'aborder des documents progressivement plus complexes. Un des écueils des manuels est que ces documents ne sont jamais contextualisés, ce sont des extraits d'autres documents. En dehors du paratexte il est donc difficile pour les élèves d'effectuer une approche critique car ils peuvent ne pas connaître le contexte d'émission.
Exemple de travail sur un texte de France info sur le détroit d'Ormuz
Cet article est intéressant à plusieurs titres :
- par sa forme hybride (cartes, vidéos, images, texte), l’article se rapproche des documents auxquels les élèves sont aujourd’hui confrontés ;
- le résumé à la fin permet de montrer les différents niveaux de lecture et un exemple de synthèse
- il propose une démarche claire : localisation, contextualisation, rappels historiques, description des évènements, réflexion prospective.
- par sa longueur il peut se prêter à des exploitations pédagogiques très diverses (utilisation des liens complémentaires, redécoupage du texte pour des travaux de groupe, utilisation par le professeur de parties de l’article pour nourrir son propos,…).
D'autre part, le travail de documents du manuel conduit trop souvent à une "sacralisation" du support qui ne peut être annoté. Dans l'exemple du document sur les nouvelles formes de conflictualité, un double travail de surlignage et d'analyse dans une colonne à droite est proposé.
Un outil d’évaluation au service des apprentissages : l’échelle descriptive
Les échelles descriptives permettent de critérier et d’expliciter l'évaluation, afin de faciliter la progression des élèves. Cet article décrit plus précisément leur utilisation.
Au-delà de l’harmonisation des pratiques d’évaluation au sein d’une équipe, l’outil permet de clarifier les attendus de l’exercice. Au terme de sa scolarité obligatoire, les élèves ont été familiarisés avec l’analyse de document(s).
Compétences travaillées en histoire géographie (programme de cycle 4) |
Capacités travaillées et méthodes acquises en histoire et en géographie (programme de terminale) |
|
- Savoir lire, comprendre et critiquer une carte, un croquis, un document iconographique, une série statistique…
|
L’explicitation des capacités travaillées et méthodes acquises en histoire et en géographie est nettement moins détaillée et les consignes proposées dans les sujets zéro ou les sujets de la BNS permettent de mesurer l’autonomie attendue d’un élève de lycée dans l’analyse d’un document. Pour les accompagner dans l'appropriation de la méthode, les échelles descriptives peuvent ici constituer des outils intéressants au service des apprentissages. En explicitant clairement les attendus de l’épreuve sur le plan méthodologique, elles permettent de mieux s’approprier la démarche et de mieux identifier les pistes d’amélioration.