Les activités de mémorisation en classe de langue
En expérimentant la pratique de la mémorisation du lexique et des structures langagières pendant le temps de classe, j’ai pu constater une nette amélioration des performances des élèves. En effet, nombreux sont ceux qui m’ont avoué n’avoir jamais trouvé la motivation nécessaire pour étudier le lexique lorsque leurs professeurs le leur demandaient au collège et le fossé s’est alors forcément très vite creusé avec ceux qui, eux, apprenaient leurs leçons régulièrement.
C’est cet aveu qui a motivé ma décision de mettre en place une phase supplémentaire dans chacune de mes séances : la révision presque systématique des acquis des élèves suivie de la mémorisation du nouveau lexique. Il me semble en effet qu’une grande partie des difficultés d’apprentissage que peuvent rencontrer les élèves vient du fait que, pour apprendre une langue vivante dans le cadre scolaire, il est impossible de faire l’économie de l’apprentissage « par cœur ». Or, nos élèves actuels ont beaucoup de mal à soutenir un effort dès lors qu’il n’y a aucune fonction de plaisir qui s’active. L’une des solutions peut donc être de consacrer, en classe, une partie de la séance (pas plus de 10 minutes) à la mémorisation du lexique (entre 7 et 12 mots selon les classes), en essayant de rendre cette activité aussi stimulante que possible et en la présentant un peu comme un défi à relever (et on sait à quel point ils sont habitués à relever toutes sortes de défis dans les jeux vidéos qui occupent une si grande place dans leur quotidien). C’est aussi, pour les élèves, une façon « d’apprendre à apprendre » et il arrive parfois que certains d’entre eux, voyant qu’ils sont capables de retenir de plus en plus de mots au fil des séances, soient moins réticents à l’idée de consacrer un peu de temps à l’apprentissage du lexique chez eux. Le stock de vocabulaire qu’ils se constituent ainsi petit à petit, associé aux structures langagières travaillées en classe, leur permet peu à peu de s’exprimer et ils prennent alors vraiment conscience que les mots sont les outils indispensables qui rendent la communication possible. Cette prise de conscience et de confiance en leurs propres capacités est, à mon avis, une condition essentielle pour enclencher, ou les aider à maintenir, leur motivation.
Étape 1 :
Il est important de limiter cette phase de mémorisation dans le temps car elle nécessite une grande concentration de la part des élèves (possibilité d’afficher un compte à rebours de 10 minutes).
Je commence par présenter un seul mot illustré par une « flashcard » en insistant bien sur la prononciation (répétitions), puis un deuxième (répétitions). Je remontre ensuite la première image pour vérifier si les élèves ont bien mémorisé les deux premiers mots, puis je présente une troisième image en demandant aux élèves de redire ce dernier mot ainsi que les deux précédents, 2 ou 3 fois et pas forcément dans l’ordre. Je procède ainsi de manière spiralaire.
Exemple d’application
Dans une séance intitulée "Home swapping", les élèves doivent mémoriser 12 mots de la catégorie "Home appliances". Après cette première phase de présentation, j'aimante toutes les flashcards au tableau les unes à la suite des autres et les élèves doivent nommer les cartes au fur et à mesure. Puis, je "fais disparaître" la première carte en la retournant (Goodbye "vacuum cleaner") et demande à un élève de nommer cette première carte ainsi que toutes les suivantes. Je fais alors disparaître la deuxième (Goodbye "microwave oven") et un autre élève doit se souvenir des deux premières cartes déjà cachées et continuer à nommer les10 autres encore visibles. Petit à petit, toutes les cartes sont retournées et je demande alors à un élève volontaire de nommer toutes les cartes (devenues toutes invisibles) dans l'ordre. Au fur et à mesure que l'élève propose un mot, je vérifie en retournant la carte et le félicite.
Les élèves aiment beaucoup cette activité qui est stimulante. Néanmoins, il est important qu'ils comprennent que le lexique qu'ils ont mémorisé doit être utilisé dans des contextes significatifs et variés de façon à donner du sens à cette mémorisation et qu'ils puissent ensuite opérer, de façon autonome, un transfert de leurs apprentissages dans la production d'énoncés dont ils seront eux-mêmes les auteurs.
Étape 2
D'ailleurs la mémorisation à long terme ne pourra se faire qu'à condition d'ancrer immédiatement ce nouveau lexique dans des phrases en l'associant aux structures langagières déjà travaillées en classe ou, pourquoi pas, en proposant de nouvelles structures (dans ce cas, il est possible de demander aux élèves quelle phrases contenant le nouveau lexique ils aimeraient être capables de dire en anglais). Dans cette séquence "Home swapping", les élèves avaient choisi de dire : "Look, I've bought this ..................;..., but it doesn't work. I have to bring it back".
Pour les aider à mémoriser une phrase entière ou, comme dans ce cas, deux phrases successives, j'utilise quelquefois la bombe que l'on trouve dans le jeu de société "Tic Tac Boum" : Je prononce la phrase intégrant un élément du nouveau lexique ("Look, I 've bought this oven but it doesn't work. I have to bring it back"), puis je donne la bombe à un élève qui doit lui aussi prononcer ces deux phrases sans erreur et faire ensuite passer la bombe à son voisin. Chaque élève doit systématiquement changer le nom de l'appareil en panne (les flashcards représentant les "Home appliances" peuvent être affichées au tableau de façon à aider les élèves). L'élève qui a la malchance d'entendre la bombe exploser alors qu'elle se trouve entre ses mains est éliminé.
Grâce à cette activité, les élèves entendent et prononcent les phrases intégrant le nouveau lexique et les nouvelles structures langagières tellement souvent qu'ils les mémorisent généralement très vite.
Pour cette séquence "Home swapping", j'ai moi-même choisi le lexique que je souhaitais faire mémoriser aux élèves. Mais il est également possible de sélectionner le lexique à partir des propositions faites par les élèves eux-mêmes en partant par exemple d'une carte mentale qu'ils ont eux-mêmes complétée au début de la séquence.
Par exemple, pour une séquence intitulée « Talking about films », j'ai choisi de commencer la séquence en faisant réaliser aux élèves des cartes mentales en utilisant la méthode du "set de table", technique présentée dans 52 méthodes pour enseigner (Editions Canopé).
Autre méthode d’aide à la mémorisation
Le "set de table" ou "placemat" (photo ci-contre) est une grande feuille de papier divisée en 4 cases individuelles et une case commune au centre.
4 élèves sont assis autour de cette grande feuille. Chaque élève a devant lui sa case individuelle.
Lors de la première étape, chaque élève inscrit dans sa case les mots qui lui viennent à l'esprit lorsqu'il entend le mot "cinema"(en anglais si possible mais ils ont le droit de les écrire en français). Il s'agit d'une étape de réflexion. Donc, les élèves ne se parlent pas entre eux et restent silencieux.
Puis arrive la deuxième phase : Il s'agit d'une phase d'échange où chaque élève montre aux trois autres élèves de son groupe ce qu'il a écrit dans sa case et où ils écrivent ensemble, dans la grande case centrale du set de table, tous les mots qu'ils ont trouvés. C'est lors de cette phase qu'ils doivent utiliser le dictionnaire ou "Word reference" pour traduire tous les mots afin de les écrire en anglais dans la case centrale avec des feutres de différentes couleurs (certains y associent spontanément des dessins pour illustrer leur "placemat".)
Enfin, lors d'une troisième phase, un "rapporteur" dans chaque groupe vient au tableau présenter le "placemat" et prononce en anglais tous les mots trouvés par son groupe.
Lorsque tous les groupes sont passés, on dispose d'une liste de mots de laquelle on peut partir pour commencer la séquence.
Cette activité entraîne les élèves au travail collaboratif dans la mesure où chacun apporte sa contribution personnelle à un travail de groupe qui sera ensuite présenté à la classe et ils apprécient vraiment la phase d'échange qui, étonnamment, se déroule la plupart du temps dans le calme.
Étape 4 :
En ce qui concerne les activités de mémorisation en fin de séquence, pour préparer la réalisation de la tâche finale par exemple, il est possible de proposer aux élèves des "ateliers de mémorisation" où les élèves peuvent "se tester" et essayer de mémoriser les mots où les structures qu'ils n'ont pas encore pu retenir.
Par exemple, un atelier dans lequel sont formés des binômes "profs/élèves". L'élève qui joue le rôle du professeur tient le cahier de son élève avec une liste du lexique et des structures langagières utiles à la réalisation de la tâche finale et il teste la mémorisation de son élève. Il dit : "What's the English for...........?"
Dès que son élève se trompe dans une de ses réponses, il recommence la liste depuis le début, le but étant que l'élève termine la liste sans aucune erreur le plus rapidement possible. Le professeur surligne sur le cahier de son élève les mots ou les phrases qu'il a eu le plus de mal à mémoriser de façon à ce que, chez lui, il puisse leur porter une attention particulière lors de ses révisions. Puis, les rôles sont inversés.
Un autre atelier pourrait être des activités d'association d'images et de mots (activité plus à la portée d'élèves ayant des difficultés à mémoriser)en utilisant de nouveau les "flashcards".
Photo des flashcards illustrant le thème "film genres" que les élèves doivent associer avec le mot correspondant.
exemple, les élèves doivent associer chaque image au mot correspondant en un minimum de temps (activité chronométrée).
Ou encore, des "duels" peuvent être organisés dans lesquels 2 élèves de chaque équipe doivent dire le plus rapidement possible le mot correspondant à l'image montrée par le professeur ou par un autre élève. L'élève le moins rapide ou qui propose une mauvaise réponse est remplacé par un autre élève de son équipe. Lorsque tous les élèves d'une équipe sont éliminés, on compte combien d'élèves de l'équipe adverse ne sont pas encore passés (puisqu'un membre de leur équipe a éliminé le dernier élève de l'équipe adverse avant qu'ils aient eu le temps de passer) et l'équipe gagnante marque autant de points qu'il reste de joueurs non éliminés.
Les activités ludiques avec les flashcards sont nombreuses. Néanmoins, elles sont à utiliser avec prudence dans les classes difficiles, dans lesquelles les élèves ont du mal à accepter de "perdre" et où la maîtrise de soi est encore une compétence non acquise ou, en tout cas, à perfectionner. Il est donc important de rappeler de façon récurrente aux élèves que les jeux ne sont que des "entraînements" destinés à "muscler leur mémoire" et dont le seul but est de les aider à mémoriser le lexique et les structures dont ils auront absolument besoin pour être capables de réaliser la tâche demandée.
Article prpoposé par Mme Nathalie Faugères du lycée Urbain Vitry de Toulouse.