Les romans réalistes du XIXe siècle en France ont plutôt raconté des trajectoires de jeunes gens d'origine modeste, souvent provinciaux, qui montent à Paris pour y faire fortune. Ces conquérants qui parviennent à s'extraire de leur sphère sociale d'origine sont nombreux, notamment dans la Comédie Humaine de Balzac. On pense à Rastignac, Lucien de Rubempré. On pense aussi à Bel-Ami de Maupassant, Julien Sorel. Tous ces exemples sont bien ceux d'hommes du peuple lancés à l'assaut de la société et amenés à vivre dans un milieu social supérieur à celui de leur naissance. Cette mobilité ascendante trouve son pendant dans un mouvement de déchéance qui concerne bien souvent des aristocrates. Le roman en rend compte en montrant comment l'aristocratie perd le pouvoir, notamment dans la sphère économique et sociale qui voit à partir de 1830 le triomphe de la bourgeoisie d'affaires. Au personnage du parvenu correspond en sens inverse celui du ou de la déclassée qui doit renoncer à la vie oisive et luxueuse de ses ancêtres. S'ils gardent le prestige de leur distinction et de leur naissance, les aristocrates mis en scène par Balzac et Stendhal ne sont pas à l'abri de ce déclassement. Quelle est l'originalité de Sand dans cette fresque ? Dans Le Meunier d'Angibault nous avons une expérience positive du déclassement, et même de la mésalliance. Expérience positive et volontaire. Elle est pensée avec l'objectif de fonder une nouvelle communauté et d'expérimenter d'autres types de relations humaines. La conférence de Fabienne Bercegol nous permet d'inscrire l'œuvre de George Sand en regard des romans réalistes des arrivistes masculins du XIXe siècle, une réflexion à mettre en lien avec les réflexions contemporaines sur les transfuges de classe.

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