Dossier : Les conflits dans le monde actuel

Le dossier ci-dessous a pour objectif d'éclairer les enseignants dans l'enseignement des conflits et en particulier dans le cadre du thème 2 de l'enseignement de spécialité HGGSP " Faire la guerre, faire la paix : formes de conflits et modes de résolution " .

Il s'appuie sur un corpus de ressources de nature scientifique tout d'abord avec la conférence de Stéphane Taillat, Maître de conférences à l'Institut Français de Géopolitique de l'Université Paris 8 détaché aux Ecoles de Saint-Cyr Coëtquidan, portant sur « Le caractère changeant de la guerre dans la société internationale".

Une réflexion didactique, en lien avec le groupe de travail sur les séries télévisées et le podcast Histoire en séries, est amenée au travers de deux émissions sur l'enseignement de la géopolitique et des conflits avec le séries.

Une proposition pédagogique de mise en oeuvre dans le cadre du thème 2 de l'enseignement de spécialité est également proposée. Enfin, un dernier article propose de faire travailler les élèves sur l'orientation dans les études de géopolitique, notamment en relation avec l'épreuve du Grand oral.

SOMMAIRE

 

1. VISIOCONFÉRENCE DE STEPHANE TAILLAT – 4 mars 2021
« Le caractère changeant de la guerre dans la société internationale"

2. PODCAST HISTOIRE EN SERIES : Enseigner la Géopolitique avec les séries - Thème 1 : Les CONFLITS


3. Etudier les formes de conflits et tentatives de paix dans le monde actuel en mettant l'accent sur des capacités et des méthodes utiles pour l'année de terminale et les études supérieures grâce au T2 de l'EDS

 

4. TRAVAILLER L'ORIENTATION ET LE GRAND ORAL DANS LE CADRE DE L'ENSEIGNEMENT DE SPECIALITE

 

1. VISIOCONFÉRENCE DE STEPHANE TAILLAT – 4 mars 2021
« Le caractère changeant de la guerre dans la société internationale"


La conférence aborde trois thèmes.
I/  La notion de la guerre dans la société internationale.
II/  Le recours à la force entre les États (quasi disparition des guerres interétatiques).
III/  La forme des guerres civiles / conflits armés internes, la manière dont historiquement on s’est saisi de ces sujets.

Bibliographie
« Une histoire de la guerre du XIXe siècle à nos jours », de Bruno Cabanes.
« Mondes en guerre, guerres sans frontières de 1945 à nos jours », 4e tome, de Louis Gautier.

 

I/  La notion de la guerre dans la société internationale.

La notion de guerre sans frontière évoque 2 types de conflits :
    • Les conflits armés internationaux.
    • Les conflits armés non internationaux.

Il faut au préalable distinguer la différence entre caractère et nature de la guerre. Quel rôle, quelle fonction a la guerre dans la société où dominent les États ?
Objectif : montrer qu’on peut analyser à quoi sert la guerre.
La distinction entre nature et caractère est un préalable essentiel pour bien comprendre de quoi on parle.

La nature.
La notion de nature est problématique, y en a-t-il une vraiment ? La littérature peut-elle aider à décrire la nature de la guerre ?
Voir « Man, the state, and war. A theoretical analysis », Kenneth N. Waltz.

Il y a deux approches :
    • La guerre comme extension de la nature humaine ou de la compétition entre les États.
- Celle qui consiste à dire que la guerre est avant tout une extension de ce qui existe : c’est dans la nature humaine, la guerre est culturelle. Dans ce cas est-ce que qu’il n’y aurait pas confusion entre violence et guerre ? (violence instrumentale).
- Ceux qui vont dire que la guerre est une extension territoriale entre les États : c’est une lecture positiviste bien qu’inéluctable. La guerre résulte du fait qu’il y ait des États, et s’il y a des états il y a compétition, et s’il y a compétition cela conduit à la guerre.
    • La guerre comme processus de montée aux extrêmes.
La deuxième manière d’aborder la guerre : la guerre est un processus de montée aux extrêmes. Dans cette vision la guerre résulte d’échecs, dans les stratégies des acteurs. Dans cette image la guerre est quelque chose qui peut être contrôlée ou limitée. Sauf qu’on va voir avec Clausewitz qu’il y a des facteurs d’incertitude, de passions, humains… qui rendent les choses plus complexes.

Kenneth Waltz, père de la relation néoréaliste internationale, s’interroge sur la nature de la guerre : la guerre est issue de la nature humaine, elle est liée aux différents types de régimes politiques (certains régimes sont plus bellicistes que d’autres).

Enfin on peut distinguer un troisième niveau d’analyse : le système international (comme un ensemble de pièce toutes semblables d’États qui vont entrer en collision). Dans cette dernière situation les États étant responsables de leur sécurité (de la sécurité de leurs populations) ils ne doivent pas prendre de risque et ils sont donc amenés à faire la guerre.

On le voit donc la nature est variée.

Le caractère.
Voir « Syrie, anatomie d’une guerre civile », Adam Baczko, Gilles Doronsoro, Arthur Quesnay.
Epistémologie de la guerre / le caractère de la guerre : comment est ce que la guerre va se dérouler, qui peut faire la guerre, comment, pourquoi, comment résoudre les conflits ?
Il y a deux manières de regarder la guerre dans la société internationale :
    • La guerre une caractéristique du système international.
La guerre est juste une caractéristique du système international : les entité différentes territorialisées sont indépendantes les unes des autres, à un moment où un autre si ces entités (dynasties, classes sociales ou groupes nationaux) sont en conflits, probablement que la manière de résoudre les conflits sera par la force.
    • Les manifestations empiriques des conflits armés.
La deuxième manière est de dire que si l’on veut étudier la guerre, il faut étudier les conflits tels qu’ils sont. Pour en tirer des informations qui nous permettront de comprendre les enjeux, les stratégies et surtout, comprendre comment résoudre les conflits.

La guerre : une institution de la société internationale ?

    1. S’interroger sur la guerre : une construction historique européenne.
Voir « L’invention de la paix et le retour à la guerre », Michael Howard.
Voir « The verdict of battle, the law of victory and the making of modern war », James Q. Whitman.
La guerre est une institution construite historiquement. Institution au sens de « c’est une pratique, une norme, une règle plus ou moins implicité qui régit les rapports d’une société ». Dire que c’est une institution c’est en parler du point de vue européen. Un point de vu qui s’est uniformisé sur les moyens de faire la guerre (ex : font la guerre les entités étatiques souveraines). C’est une construction historique qu’on a tendance à voir de façon linéaire. On passerait de ces guerres civiles au monde moderne.

    2. Un instrument dans les relations interétatiques.
La guerre est aussi un mécanisme de régulation du système international : en cas de déséquilibre de puissances on fait la guerre pour un retour à l’équilibre (ex : la guerre de succession d’Espagne contre Louis XIV). Ça pose problème dès lors que les guerres ne sont plus dynastiques.
La guerre comme mécanisme de résolution des conflits : La guerre est un mal mais nécessaire à condition de l’encadrer strictement.

    3. Une institution délégitimée ?
Or la guerre est une institution qui à un moment semble devenir incontrôlable. En 1945 on tente de la contrôler mais c’est une institution qui est de plus en plus délégitimée et au final le recours à la guerre ne doit être qu’un dernier recours après la Seconde Guerre mondiale. Ce processus a abouti puisque qu’on considère que le recours à la force ne peut être (et ne doit être) que réfléchi (ex : la menace à la paix, à la sécurité internationale, ou pour des raisons humanitaires) … mais toujours dans une perspective très européocentrée.

Comment analyser et comprendre les conflits armés ?
Il existe toute une série de démarches. Les deux approches opposées sont les analyses quantitatives et analyses géopolitiques.
 

Les analyses quantitatives vont consister à récolter des données brutes. Ces données conduisent à des modèles intéressants. Mais on considère les éléments comme tous semblables et ça écrase la contextualisation des conflits armés. Cela mène à une vision statistique des choses. Ne permet pas de répondre à « pourquoi ? » et donc de répondre à « comment arrêter la guerre ? ».

Analyse géopolitique : les sciences vont se pencher sur les conflits ou zones de guerre et vont tenter de contextualiser (enjeux, stratégies… des données qualitatives à différentes échelles pour construire une image plus riche). Le problème c’est que ça ne s’intéresse qu’à un seul type de conflit et c’est difficilement transposable à un autre conflit.
Voir le modèle de Clausewitz « la trinité remarquable ».

Image
modèle de clausewitz


Il nous fournit un modèle formel qu’on peut utiliser pour comprendre comment fonctionne la guerre de façon dynamique. Il découpe la guerre dans ces trois composantes : le rationnel, l’irrationnel, le non-rationnel.
Il y a des éléments rationnels, non rationnels et irrationnels et chacun de ces trois ingrédients sont liés à une dimension particulière. Il y a toujours du politique, toujours du militaire, toujours de l’économie et une dimension psycho sociale.
Ça amène au fait qu’il y a des acteurs des décideurs etc…

Les facteurs d’évolution de la guerre depuis 1945.

Si on veut comprendre l’évolution de la guerre on est souvent tenté de regarder les évolutions technologiques. Les armes nucléaires vont changer la guerre, ce sont des armes de destruction mais qui vont conduire à des impasses. L’objectif n’est pas de détruire l’adversaire mais plutôt produire l’idée qu’on peut détruire l’adversaire sans être certain de sortir soit même vainqueur, par conséquent l’arme atomique sert plus pour la dissuasion que pour l’attaque. Or les évolutions technologiques ne sont les seuls choses à prendre en compte. Il y a notamment les évolutions sociétales (la conscription a disparu par exemple dans les pays occidentaux comme aux États-Unis ou en France). Aujourd’hui on ne voit plus la guerre, les lieux de la guerre sont loin, il ne faut pas que ça pèse dans les impôts, il n’y a plus de jeunes du village qui meurent au front, la guerre a lieu loin on ne la voit plus. Inversement dans d’autres endroits du monde la guerre s’invite dans le quotidien des gens, elle est dans la rue, le village, on la voit.

Il y a aussi des contraintes juridiques : les états doivent se contraindre à ne pas avoir recours à la force sauf en cas de légitime défense (art. 51 de la charte des UN), sauf en cas de danger à la sécurité internationale. Aujourd’hui il y a des règles strictes qui encadrent la guerre, il y a des contraintes juridiques : la conséquence c’est que les États ne se déclarent plus en état de guerre car cela est trop contraignant et il faudrait respecter trop de droits (le Jus in bello ou droit humanitaire international par exemple). Le fait de ne pas se déclarer en état de guerre permet de pouvoir jouer sur l’ambiguïté de la non déclaration. L’autre conséquences c’est sur les organisations non étatiques, elles n’ont pas le droit à la guerre, mais utilisent la force pour atteindre leur objectif politique (sécessionnistes, indépendantistes, …) elles sont tenues de respecter le Jus in bello c’est-à-dire le droit dans la guerre.

Les évolutions dans l’ordre politique international. Il faut regarder comment il est organisé. C’est le cas dans la Guerre froide où domine une logique entre les deux grands, deux blocs. Or cette logique ne s’applique pas toujours, voire même est absente (logique absente lors de la guerre des 6 jours en 1967). Depuis 1990, le monde post guerre froide qui se manifeste par une hégémonie normative étatsunienne a pu jouer un rôle dans l’évolution des conflits : guerres expéditionnaires, limiter les guerres entre puissances régionales dans la mesure où elles risqueraient de se heurter à une riposte forte des grandes puissances. Les États vont à nouveau entrer dans des compétitions et cette compétition relâcherait la bride qui empêche les états d’entrer en conflit armé interétatique.

Il y a trois choses pour conclure : « vers des guerres sans frontières ? »
    • Le brouillage des catégories classiques.
    • L’extension du champ de bataille.
    • L’externalisation du fardeau de la guerre.

Le brouillage des catégories classiques (acteurs privés / publics, les échelles etc…). Ça devient très compliqué pour tout le monde d’essayer de comprendre qu’il y a la guerre. Ce qui amène à une utilisation abusive du mot guerre qu’on emploie partout et tout le temps, ce qui tend à diluer sa signification. Inversement on va avoir du mal à comprendre quand il y a la vraie guerre.
L’extension du champ de bataille : il n’est plus localisé où les armées s’affrontent (vrai depuis la Seconde Guerre mondiale) : il y a des temporalités et logiques différentes entre les acteurs et les théâtres d’opérations.
L’externalisation du fardeau de la guerre : le fardeau économique (impôts)…. mène à confier la guerre à des acteurs externes, des acteurs locaux, des acteurs par substitution, des sociétés, entreprises etc… On parle d’externalisation au sens de « extérieur » : le but est de limiter les pertes humaines (par exemple le drone est piloté des États-Unis et son action se situe loin).


II/  Le recours à la force entre les États (quasi disparition des guerres interétatiques).

Graphique « la guerre et la paix » 2020. Source : « La guerre et la paix », O. Schmitt, 2020.

PRIO : Peace Research Institute Oslo.
UCDP : Uppsala Conflict Data Program.
On prend tous les affrontements armés entre deux belligérants dans l’année et on comptabilise le nombre de morts pour les classer dans des catégories :
    • moins de 25 morts, c’est un conflit armé.
    • entre 25 et 1000 morts, c’est une guerre.
    • plus de 1000 morts, c’est une guerre majeure.
Les guerres et guerres majeures sont peu nombreuses, 12 guerres en moyenne par année ces trois dernières années sur une cinquantaine de conflits armés. On compte deux ou trois guerres majeures (généralement Irak ou Syrie).
Ce diagramme permet de constater qu’il a beaucoup de conflits armés moins de 25 morts), on est dans une période très belligène.
La répartition : les guerres de décolonisation se sont achevées dans les années 1970. Le nombre de conflits armés interétatiques a baissé, il y a eu des guerres majeures entre les états (la guerre Iran Irak dans les années 70).
L’année dernière il y a avait eu 2 confits interétatiques en plus des incidents de frontières (incidents au Pakistan par exemple). Inversement le type de conflit qui domine ce sont les guerres civiles avec intervention des états étrangers. Statistiquement on remarque donc que l’écrasante majorité des conflits armés depuis 1945 sont des guerres civiles.

De nouvelles grammaires stratégiques marginalisant le recours à la guerre ouverte.
La guerre ne se limite pas aux militaires. La grammaire renvoie à la notion que la guerre peut prendre des formes très différentes. Il y a de nouvelles grammaires stratégiques. Elles marginalisent le recours à la guerre ouverte pour des raisons liées aux coûts politique, économique et militaire.

es stratégies de dissuasion : depuis les années 1950 on allait utiliser un bras de fer, un marchandage sans utilisation de la force, elle est contenue en potentialité grâce à la force nucléaire : juste une menace, une dissuasion.
Les stratégies de coercition : exiger de la cible un comportement ou décision qu’il ne voudrait pas prendre, le contraindre à prendre une décision contre son gré : on compte les sanctions économiques… et l’usage de la force. J’envoie des signaux à l’autre pour lui faire comprendre ce que j’attends de lui. On est là dans une stratégie de communication qui trouve ses limites car cette stratégie fonctionne à condition que l’autre comprenne les signaux.
Un emploi limité de la force : opérations clandestines et guerres par procuration ? Il est aujourd’hui de plus en plus compliqué de nier ses responsabilités lors d’opérations clandestines. Aujourd’hui il y a de plus en plus de moyens pour faire des opérations clandestines mais c’est de plus en plus compliqué de dire qu’on n’a rien fait quand on est l’acteur de ces opérations (témoignages, caméras…).
La guerre par procuration permet d’externaliser les opérations. Or on ne contrôle pas les acteurs par procuration. La relation asymétrique devient de plus en plus symétrique.
Les stratégies hybrides : idée que les États vont tenter de rester sous le seuil, mêler, combiner plusieurs moyens pour atteindre les objectifs.

Les mutations de la conquête territoriale.
Partons de l’invasion du Koweït par l’Irak de Saddam Hussein (2 août 1990). Sa stratégie était une stratégie de fait accompli : Saddam Hussein pensait que les États-Unis n’interviendraient pas pour deux raisons :
- Première raison : les États-Unis s’attendent à ce que l’URSS s’oppose à un recours à la force (à l’ONU avec leur droit de véto).
- Deuxième raison : l’Irak pense que les États-Unis n’oseront pas intervenir de peur d’avoir des pertes humaines ce qui serait ma accepté par la population américaine (selon l’Irak).
Mais les États-Unis vont obtenir un consensus auprès de l’ONU ce qui va lui permettre d’intervenir. C’est donc là une mauvaise lecture des enjeux de la part de Saddam Hussein qui pensait que les États-Unis n’interviendraient pas.
On peut comparer cette erreur de lecture stratégique avec l’annexion de Crimée par la Fédération de Russie (février mars 2014). Le but est le même que pour l’Irak et le Koweït : annexer un territoire. Poutine va annexer la Crimée mais va éviter la guerre ouverte, sauf que pour lui cette stratégie va fonctionner. Poutine pense que les États-Unis n’interviendront pas si l’on prend des précautions pour rester sous un seuil d’imputabilité. Il y a eu toute une manœuvre pour préparer le terrain en Crimée, des hommes sur le terrain, des campagnes d’information et de désinformation, et enfin le rôle important de la base navale russe de Sébastopol. La Russie va mener une opération militaire très rapide ajoutée à une opération politique avec le référendum.

Exception : la guerre entre Arménie et Azerbaïdjan : relique du passé ou retour à la guerre ? Préparation très importante du terrain depuis 25 ans, l’Azerbaïdjan a tenté de tester les défenses arméniennes et sa détermination. L’Azerbaïdjan a voulu démontrer sur la scène internationale que l’occupation du terrain par l’Arménie n’était reconnue par personne et que par conséquent cette occupation était illégitime. On est dans une conquête territoriale qui s’inscrit dans le droit et dans une approche plus globale de déclaration de guerre ouverte. Est-ce le retour à la guerre ? L’opération militaire a été courte (armée plus moderne de l’Azerbaïdjan qui bénéficie de surcroît du soutien russe). Il semble qu’il y ait une combinaison : une conquête territoriale en évitant le recours à la force, et quand on l’utilise on va maximiser les moyens.


III/  La forme des guerres civiles / conflits armés internes, la manière dont historiquement on s’est saisi de ces sujets.

Le contexte général depuis 45.
La diffusion technologique : les armes sont de plus en plus disponibles (600 millions d’armes de guerre en circulation en 2006). Aujourd’hui on a en plus des hautes technologies, ce qui facilite les guerres (drones par ex). Cette diffusion favorise l’émergence d’affrontements armés.

Les mutations de la politique révolutionnaire : du modèle de la guerre populaire maoïste au djihadisme contemporain. On est passé d’un modèle de guerre maoïste des années 1950 à un modèle contemporain. La guerre maoïste c’est trouver des causes politiques pour mobiliser la population, la première étape est la guérilla pour déstabiliser l’adversaire, la seconde étape consiste à transformer les milices en corps armés pour mener la guerre conventionnelle. Dans ce modèle on bascule bien vers un modèle de guerre conventionnelle.
Le djihadisme contemporain est davantage éclaté et s’en tient au stade de la guérilla car il est difficile de se maintenir en gardant la main sur un terrain, il fonctionne plutôt en réseau. Il s’agit avant tout de mobiliser (les populations), dans un cadre d’idéologie avec un ennemi proche (les régimes apostats qu’il faut renverser) et un ennemi lointain (les États-Unis par ex). Les guerres civiles n’obéissent pas à des modèles stratégiques absents.

La décolonisation : l’auto-détermination dans un cadre territorial donné. Il y a eu des guerres dans le cadre même du processus de décolonisation et il y en a eu après. C’est au nom de l’autodétermination que la décolonisation a pu avoir lieu d’un point de vue normatif. L’autodétermination est reconnue en droit (voir l’article de l’ONU sur le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes) mais pas en principe (voir le tracé des frontières qui a été tracé par les puissances coloniales).

Les guerres civiles depuis les années 1990.
Depuis les années 90 les guerres civiles sont devenues de plus en plus longues. Lorsque ces conflits se terminent par une paix négociée ça ne dure pas longtemps. Cela conduit à des impasses militaires et des impasses diplomatiques. A cela s’ajoute les limites des modèles de maintien de la paix et de sécurité collective (ex : l’ex Yougoslavie). Implique le recours à une force neutre comme les casques bleus. Ces modèles trouvent des limites car reposent sur des États qui acceptent de s’impliquer pour le maintien de la paix, mais peu de grandes puissances s’investissent.
Des conflits armés plus longs - des impasses militaires et diplomatiques - les limites des modèles de maintien de la paix et de la sécurité collective.

Les facteurs de la guerre civile.
 La violence qui se déploie dans la guerre est souvent instrumentale. La logique de la violence est souvent utilisée (violences contre les civils, viols etc… qui sont exploités par les médias).
La guerre civile est un symptôme d’un processus de formation et de consolidation du pouvoir étatique, c’est l’idée que l’État fait la guerre et la guerre fait l’Etat. La guerre est donc fondamentalement violente.
 Les facteurs identitaires et entrepreneurs politiques : il faut des griefs, des moyens et une faiblesse de l’État pour engendrer la violence. Les entrepreneurs vont utiliser ces facteurs identitaires pour montrer que la guerre civile est le seul moyen d’arriver aux objectifs.
 Ressources, opportunisme et stratégies de pédation : plutôt un facteur de continuation qui explique pourquoi il est difficile de résoudre les conflits. Il s’agit d’acteurs qui n’ont pas intérêt à ce que les conflits s’arrêtent car ils en profitent.
 Des structures sociales et des récits historiques qui peuvent être mobilisés : par ex le nettoyage ethnique en Bosnie est justifié par les serbes au nom du fait que pendant la Seconde Guerre mondiale les bosniaques ont procédé aussi à des nettoyages ethniques.

2. PODCAST HISTOIRE EN SERIES : Enseigner la Géopolitique avec les séries - Thème 1 : Les CONFLITS

 

 

 

 

3. Etudier les formes de conflits et tentatives de paix dans le monde actuel en mettant l'accent sur des capacités et des méthodes utiles pour l'année de terminale et les études supérieures grâce au T2 de l'EDS

 

4. TRAVAILLER L'ORIENTATION ET LE GRAND ORAL DANS LE CADRE DE L'ENSEIGNEMENT DE SPECIALITE

 

L'enseignement de spécialité a pour vocation de préparer les élèves au supérieur tant par les compétences acquises, la précision des connaissances sur les thématiques que dans l'aide au choix des parcours d'orientation. Rencontrer un chercheur ouvre toujours de larges horizons intellectuels :

Comment inviter les élèves à se familiariser avec le monde de la recherche tout en saisissant ses enjeux? (saisir les enjeux de la connaissance en invitant l'élève à se familiariser avec les chercheurs)

Comment intégrer - à travers les thèmes du programme - la découverte des métiers et des poursuites d'études, nécessaires pour leur orientation et le Grand oral ?


Niveau :
EdS HGGSP Terminale et Première

Thèmes du programme
th 2 « Faire la guerre, faire la paix : formes de conflits et modes de résolution » - Tle
th 6 « L'enjeu de la connaissance »  dont OTC « Le cyberespace : conflictualité et coopération entre les acteurs  » - Tle
th 2 « Etudier les divisions politiques du monde : les frontières » - 1ère
mais le sujet est également en lien avec « De nouveaux espaces de conquêtes » - Tle et « Analyser les dynamiques des puissances internationales » - 1ère

Itinéraire 1

Objectifs notionnels / capacités – compétences:
> vers le Grand Oral
>vers le supérieur
« ...d’affirmer et de conforter le choix de leur poursuite d’études ».
« ...d’affiner les capacités d’analyse et la maîtrise des savoirs et des compétences nécessaires à la réussite dans l’enseignement supérieur : autonomie, capacité de réflexion et d’analyse »
« Analyser, interroger, adopter une démarche réflexive, qualité de l’expression écrite ou orale, curiosité intellectuelle... »
« En terminale, les élèves sont invités à exposer en pleine autonomie ces éléments. »
>dégager les enjeux d'un article et les exprimer clairement (vers le Grand Oral)
>lire un article d'un chercheur : savoir en faire une analyse géopolitique (relations internationales, enjeux, acteurs, rapports de force)
>citer un chercheur dans une dissertation/critère de l'échelle descriptive (vers le BAC/supérieur)
>faire le lien entre les travaux d'un chercheur et un thème/une actualité

Documents  / outils mobilisés :
un article de l'enseignant - chercheur Stéphane Taillat
le site internet de GEODE
le site internet des Ecoles de St Cyr-Coëtquidan


Activités des élèves
un portrait de chercheur :  Stéphane Taillat

Image
cyberdefense couverture s taillat

Maître de conférences à l'Institut Français de Géopolitique de l'Université Paris 8 détaché aux Ecoles de Saint Cyr Coëtquidan où il enseigne les relations internationales et les études stratégiques.
-Chercheur au pôle "mutations des conflits" du Centre de Recherche des Ecoles de Saint Cyr-Coëtquidan
-Chercheur à l'IFGLab
-Chercheur au centre "géopolitique de la datasphère" (GEODE)
Co-direction:
-avec Amaël Cattaruzza et Didier Danet, La cyberdéfense, politique de l'espace numérique, Armand Colin 2018.
-avec Joseph Henrotin et Olivier Schmitt, Guerre et stratégie: approches, concepts, PUF, 2015.

" La géopolitique du cyberespace est un domaine très important dans l'enseignement de spécialité. Il intègre une vision transversale des enjeux et des acteurs de la scène politique contemporaine, à l'échelle internationale bien sûr (rivalités sur l'avenir du cyberespace, compétitions entre les Etats-Unis et des Etats comme la Chine ou encore la Russie, etc..) mais aussi à d'autres échelles pertinentes pour la science politique (l'avenir des modèles démocratiques, le rôle croissant des individus, la remise en question des pratiques de la souveraineté étatique,  etc..). Le cyberespace invite à repenser la notion de puissance et les pratiques des acteurs dans le système et la société internationale.

Notre objet de recherche porte non seulement sur le cyberespace (ses acteurs, leurs enjeux et leurs stratégies pour le mobiliser, le contrôler ou le défendre), mais aussi sur la question du stockage, des flux et du traitement des données (la datasphère). Sur ce point, le centre GEODE cherche à analyser la datasphère en la cartographiant mais aussi en s'interrogeant sur l'impact politique de l'usage des données (flux, stockage, traitement). Mes recherches interrogent notamment le rôle des données dans les questions stratégiques et militaires. Plus particulièrement, je cherche à comprendre l'interaction entre ce domaine croissant et les évolutions dans les pratiques militaires (commandement, combat, etc..). La mise en données et la mise en réseau des forces armées (la numérisation) sont censées avoir un impact positif sur leur efficacité. Dans le même temps cependant, ce processus pose de nouveaux problèmes et crée des vulnérabilités. La question est donc de comprendre comment les différentes organisations militaires s'adaptent à ce nouveau domaine, comment elles optimisent les données ou cherchent à en limiter les vulnérabilités. Je m'intéresse aussi à l'évolution de l'approche américaine en matière de cyberdéfense (c'est à dire de l'intégration du domaine numérique comme un champ de bataille ou comme un espace de conflictualité). "

 

ACTIVITES

Etape 1 : lire un article de chercheur
« Conflictualité et coopération dans le cyberespace », Stéphane Taillat
 

>autre possibilité : en lien avec les nouvelles formes de conflits :

Article paru dans la revue DSI hors-série n°64, « Techno-guérillas – Anatomie de l’ennemi probable  », février-mars 2019.

Etape 2 : analyser : répondre aux questions à l'appui de l'article
    • Quelle est la définition de conflit pour ce chercheur ? Pourquoi les actions liées au cyberespace entrent -elles dans la catégorie d'actions clandestines ? Quelle est la définition américaine de la conflictualité dans le cyberespace ?
    • Quels sont les acteurs en jeu ?
    • Quels sont les facteurs de conflictualité ?
    • Quelles sont les moteurs et les modalités de la coopération ?
    • Bilan : En quoi le cyberespace est-il une question géopolitique ? (aide : 2018 /10 /27 Arte : Le Dessous des cartes : « Le cyber, nouvel espace géopolitique »)

Etape 3 :  Pour aller plus loin
La classe -divisée en groupes- peut faire une recherche particulière sur les exemples de tensions citées par l'auteur (et d'autres exemples) et y appliquer la grille d'analyse proposée dans l'article.
    • opération Wannacry (mai 2017)
    • opération NotPetya (juin 2017)
      
    • Stuxnet (2010-2011) vs Shamoon/Saudi Aramco (2012) pour le contexte géopolitique (le nucléaire iranien, les relations américano-israéliennes sur ce dossier, la rivalité naissante Iran/Arabie Saoudite) aussi bien que pour les acteurs ou encore le type d'opération (sabotage);
    • Sony Pictures Entertainment (2014) pour la question de l'attribution et les questions qu'elle pose
    •  BlackEnergy (2015-2016) pour le contexte géopolitique (la guerre en Ukraine) aussi bien que le type d'opération (coupures d'électricité) que l'acteur qui en serait à l'origine (SandWorm).

Vers le supérieur :
    • ces exemples pourront être investis dans les dissertations.
    • sélectionner des citations de l'auteur en fonction de sujets de dissertations possibles.

Etape 4 : Replacer l'article, le chercheur dans son contexte / ses centres de recherche (comment fonctionnent la recherche et la communauté scientifique ?)

a) Stéphane Taillat est membre du centre GEODE: https://geode.science/

>faire une recherche sur le site GEODE : https://geode.science/chercheurs/
    • Mieux connaître les chercheurs : vous trouverez le parcours et la spécialité de l'auteur.
    • Qui sont les autres chercheurs et les thèmes de recherches abordés ?

>comprendre le centre de recherche et de formations pluridisciplinaire :  GEODE (Université Paris 8)
Répondre aux questions à partir du visionnage de la vidéo « Présentation de GEODE, par Frédérick Douzet » et de l'organigramme

    • Qu'est -ce que la datasphère ?
    • Quels sont les objets de recherche, les questions posées ?

b) Stéphane Taillat (l'auteur) intervient aux Ecoles St Cyr-Coëtquidan
Répondre aux questions pour mieux comprendre ce centre de recherches :
    • Quel est son pôle de recherche ? (CREC)
https://www.st-cyr.terre.defense.gouv.fr/index.php/esl/Centre-de-recherche-des-ecoles-de-Saint-Cyr-Coetquidan/Menu-Principal/Poles/Mutation-des-conflits/Les-chercheurs-du-pole-Mutation-des-conflits/Stephane-TAILLAT

    • Quels sont les axes de recherches du pôle  (CREC)?
https://www.st-cyr.terre.defense.gouv.fr/index.php/crec/Centre-de-recherche-des-ecoles-de-Saint-Cyr-Coetquidan/Menu-Principal/Poles/Mutation-des-conflits/Les-axes-de-la-recherche

    • Qui sont les autres chercheurs ?
https://www.st-cyr.terre.defense.gouv.fr/index.php/crec/Centre-de-recherche-des-ecoles-de-Saint-Cyr-Coetquidan/Menu-Principal/Poles/Mutation-des-conflits/Les-chercheurs-du-pole-Mutation-des-conflits
=choisir un chercheur en « relations internationales » et retenir ses axes d'études.

    • Pourquoi les Ecoles de Saint-Cyr Coëtquidan ont-elles intégré un centre de recherche ?
https://www.st-cyr.terre.defense.gouv.fr/index.php/La-Recherche
Convaincues de la nécessité de "produire des connaissances" pour prodiguer une formation de qualité, les Écoles de Saint-Cyr Coëtquidan (ESCC) ont entrepris de faire de la recherche au service de la formation des élèves officiers l’un des axes stratégiques de leur développement

Vers le Grand oral : ces recherches et parcours peuvent être investis dans la 3ème partie du Grand Oral.

Itinéraire 2

> Vers le Grand oral : préparer la 3ème partie :

Les 5 dernières minutes d'échanges avec le jury portent sur le projet d'orientation du candidat. Le candidat montre que la question traitée a participé à la maturation de son projet de poursuite d'études, et même pour son projet professionnel.

Objectifs notionnels/capacités
>faire le lien entre une thématique étudiée et les poursuites d'étude possibles
>faire le lien entre un sujet de Grand oral et sa poursuite d'étude/Armée
à partir des compétences et capacités
en connaissant les modes d'accès aux Ecoles de St Cyr
> Enrichir une notion : cyberdéfense (par groupes de travail successifs)

Documents mobilisés
l'article d'un chercheur/point de départ
Site internet du Ministère de la Défense
Site internet des Ecoles de St Cyr-Coëtquidan

Activités des élèves
Suite à la rencontre avec un enseignant-chercheur ou à l'étude d'un article de chercheur en relations internationales, connaître et savoir expliquer les voies de formation vers les écoles de St Cyr, approfondir son parcours avenir.

Etape 1 : Connaître la politique française en matière de cyberdéfense
    • Pourquoi la cybersécurité est-elle devenue la priorité du Ministère des Armées?
    • Pourquoi garantir la souveraineté numérique est-il un nouveau défi pour la Nation?
https://www.defense.gouv.fr/portail/enjeux2/la-cyberdefense/la-cyberdefense/presentation

On peut aussi utiliser: la revue stratégique de cyberdéfense publiée sous l'égide du SGDSN en 2018.

Etape 2 : Découvrir le fonctionnement du ComCyber
=diviser la classe en 5 groupes pour s'intéresser chacune à une actualité du COMCYBER
=réaliser une synthèse écrite
=répartir les élèves de nouveau en 5 groupes avec un représentant de chaque groupe de départ
= ensemble, proposer par écrit- une définition enrichie de cyberdéfense appliquée à la France, tenant compte de l'apport des 5 articles.

    1. Connaître l'actualité du FIC 2020 : La 12e édition du Forum international de la cybersécurité (FIC) se tient du 28 au 30 janvier 2020 à Lille, sur le thème « Replacer l’humain au cœur de la cybersécurité ».

    2. la création d'un pôle "cyberdéfense" du ComCyber à Rennes: article du Monde - fin 2019
    3. la création d'un pôle "cyberdéfense" du ComCyber à Rennes:  article de Ouest France - décembre 2020
       
    4. Trois questions au général Didier Tisseyre, nouveau ComCyber

       
    5. Cyber Coalition 2018 : l’exercice de renforcement de la coopération internationale des alliés

    6. Le commandement de la cyberdéfense va défiler sur les Champs-Élysées
 

Etape 3 : Connaître les Parcours de formation des Ecoles de St Cyr où enseigne l'auteur:
Découvrir le site du Ministère de la Défense

et celui des Ecoles de St Cyr-Coëtquidan :
 

>Comment intégrer l'Ecole Spéciale Militaire de St Cyr ?
 

>Découvrir le master spécialisé cyberdéfense
 


>Pour aller plus loin sur les formations /Armée
une ressource : Inspire (formations post-bac de l'armée)
 

une ressource : ONISEP : métiers du secteur défense
 


Bibliographie / sitographie
-La cyberdéfense. Politique de l'espace numérique. Stéphane Taillat , Amaël Cattaruzza , Didier Danet, 2018, Armand Colin, 256 pages.
- Editorial « Du cyberespace à la datasphère. Enjeux stratégiques de la révolution numérique »
Frédérick Douzet, dans Hérodote 2020/2-3 (N° 177-178), pages 3 à 15.

- "Cyber opérations offensives et réaffirmation de l’hégémonie américaine : une analyse critique de la doctrine de Persistent Engagement » S. Taillat, Hérodote 2020/2-3 N° 177/178 — Géopolitique de la #Datasphere
-« La cyberguerre aura-t-elle lieu ? » Stéphane Taillat dans Sciences Humaines 2017/3 (N° 290), page 6
-« Cyberopérations : l’avenir des opérations clandestines ? » Stéphane Taillat, article paru dans la revue DSI n°148, « F-35 Block 4 : Quelles capacités ? », juillet-août 2020.

- « La présidence Trump : un « moment Spoutnik » pour la cyberdéfense aux États-Unis ? », Stéphane Taillat, article paru dans la revue DSI n°147, « Guerre aérienne et opérations multidomaines », mai-juin 2020.


- « Penser le cyber : numériser le champ de bataille ? , Stéphane Taillat, article paru dans la revue DSI n°150, « Haut-Karabagh : Les leçons d’une guerre de haute intensité », novembre-décembre 2020.

- site internet du FIC
 

- Pixels

- Numerama
(et notamment son média "cyberguerre" lancé en 2018)
- 01Net

 

Illustration de couverture sous licence Creative Commons :
https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/f/f4/US_Navy_030323-N-5796A-002_The_Tactical_Operations_Officer_%28TAO%29%2C_along_with_Operations_Specialists%2C_stand_watch_in_the_Combat_Direction_Center_%28CDC%29_aboard_the_aircraft_carrier_USS_Abraham_Lincoln_%28CVN_72%29.jpg