L’étude critique de document au collège

“Quel que soit l’objet sur lequel elle porte, la critique n’est pas affaire de débutant, comme le montrent bien les difficultés des étudiants aux prises avec un texte. Il faut déjà être historien pour critiquer un document, car il s’agit, pour l’essentiel, de le confronter avec tout ce que l’on sait déjà du sujet qu’il traite, du lieu et du moment qu’il concerne. En un sens, la critique, c’est l’histoire même, et elle s’affine au fur et à mesure que l’histoire s’approfondit et s’élargit.” 

Antoine PROST, Douze leçons sur l’histoire, Seuil, coll. Points Histoire, 1996, p.59

  1. L’étude critique de document plutôt que le seul “prélèvement” : pourquoi ?

“L’étude critique de document est un travail exigeant, loin des évidences et du seul prélèvement d’informations. Le prélèvement d’informations, s’il est utile dans l’identification des idées principales ou le repérage d’ exemples, il ne peut se substituer à l’étude critique de document. Nos élèves doivent apprendre à mettre en relation les informations prélevées, à les analyser et à les critiquer. Ils se familiarisent ainsi avec le raisonnement et les outils du géographe et de l’historien. 

L’étude critique de document est une activité-clé car en lien avec plusieurs compétences, dont 

De manière plus générale, cet exercice intellectuel est la garantie même de l’acquisition progressive d’un esprit critique et rejoint donc les finalités citoyennes de nos disciplines. Il s'inscrit dans une progressivité des apprentissages. L'analyse critique de documents est une épreuve du baccalauréat dans le cadre de l'enseignement de spécialité HGGSP. Il convient donc d'aborder cette démarche de manière simple dès le collège.

2. L’étude critique de document au collège : comment ? 

A. Quel choix de document(s) ?

L’étude critique de document requiert un véritable processus d’appropriation de la part des élèves. Il ne s’agit pas tant d’accumuler les supports que de développer une analyse approfondie et réflexive des documents retenus. Le choix et le nombre de documents doivent ainsi demeurer à la fois raisonnables et méthodiquement justifiés, en fonction du temps imparti et des objectifs d’apprentissage.

En histoire, il s’agit de ne pas hésiter à proposer à nos élèves des sources primaires. Ce type de document permet aux élèves de se confronter directement à la langue, aux représentations et au contexte d’une époque, favorisant ainsi une compréhension concrète de l’épaisseur du temps et du caractère situé des discours.


B. Quelle méthode critique?   

Trois verbes d’action peuvent guider la réflexion de l’élève lorsqu’il doit mener l’étude de document.

Le document confirme mes connaissances.Il me fournit alors des exemples pour répondre à la consigne et je peux le citer directement.
 
Le document complète mes connaissances.Il me suggère alors des analyses que je n’avais pas : je peux le citer indirectement, je m’appuie dessus.
 
Le document contredit mes connaissances.Je le discute alors , j’explicite cette contradiction entre ce que je pensais et qu’il montre ou affirme : il peut témoigner d’une exception ou être porteur d’un discours intéressé (exemple d’un discours de propagande).

 

L'étude critique de deux documents consiste à articuler trois éléments : les deux documents et des connaissances. Deux verbes d’action éclairent alors les deux situations possibles.

Ils se complètentIls dessinent alors une évolution ou montrent deux aspects complémentaires d’un même phénomène. Je les intègre à mon discours en utilisant leur confrontation, et en les complétant par mes connaissances.
 
Ils se contredisentSi la contradiction est réelle, je tranche à l'aide de mes connaissances; si la contradiction est apparente, je fais la synthèse pour montrer qu'en fait ils se complètent.

Histoire - 3e - Exemple de deux documents qui peuvent être donnés à l'étude | Le front de l'Est et la guerre d'anéantissement

Document 1 - A l’Est, anéantir l’adversaire


“Le Führer ordonne : l'ennemi utilise dans sa guerre des bandes de combattants fanatisés et entraînés dans l'idéologie communiste. Ils ne reculent devant aucune violence. [...] Ce combat n'a plus rien à voir avec la conduite chevaleresque du soldat ou avec les conventions de Genève1. Si cette lutte contre les bandes de l'Est et dans les Balkans n'est pas menée avec les moyens les plus brutaux dans le proche avenir, les forces disponibles seront insuffisantes pour liquider cette peste. Pour cette raison, les troupes ont le droit et le devoir d'employer dans cette lutte tous les moyens sans restriction, y compris contre les femmes et enfants, si cela contribue au succès. Une marque de douceur quelconque est un crime envers le peuple allemand.”
Ordre du maréchal Keitel, chef du Haut commandement de la Wehrmacht, 16 décembre 1942 
1. La convention de Genève du 27 juillet 1929 interdit notamment de maltraiter les prisonniers de guerre

 

Document 2 - L’extermination des Juifs et Tsiganes de Marioupol par les Einsatzgruppen (1941)

À la libération des territoires par l’armée soviétique à partir de 1943, une Commission extraordinaire d’État soviétique enquête dans chaque localité sur les crimes commis par l’occupant nazi. Cette commission est chargée de recueillir un maximum de preuves et de témoignages dans la perspective d’un éventuel procès. Après la libération de Marioupol, le 10 septembre 1943, la Commission établit le 5 octobre 1943 un rapport dont des extraits sont donnés ci-dessous.

« Marioupol, le 5 octobre 1943« (…) Le 16 octobre [1941], tous les Juifs, sans considération de sexe ou d’âge, durent se présenter, avec leurs biens, dans les casernes, au prétexte d’être déplacés dans une zone moins densément peuplée. Le jour suivant, ceux qui se présentèrent furent divisés en groupes de 500-1 000 personnes et, dûment escortés, furent convoyés jusqu’à une tranchée antichar à 7 kilomètres de la ville. Là, les gens reçurent l’ordre de se déshabiller et de s’asseoir au bord de la tranchée. Les Allemands fusillèrent les hommes et les femmes dans le dos. Les bébés, tenus dans les bras de leur mère, tombèrent vivants dans le fossé. Les fascistes étalèrent une substance empoisonnée sur les lèvres des autres enfants. Les mitraillettes fusillèrent des familles entières. Les blessés gémissaient dans la tranchée mais de nouveaux corps continuaient à leur tomber dessus ; ils furent recouverts de terre. D’après les données recueillies mais non complètes, 20 000 personnes furent fusillées en 2 jours à cet endroit (…).Non satisfaits de cela, les occupants commencèrent à chasser les enfants issus des mariages mixtes. Les mères russes et ukrainiennes qui avaient des enfants de leur mari juif se virent enlever leurs enfants, qui furent fusillés. Les mères qui s’opposèrent à cette atrocité furent fusillées ensemble avec leurs enfants.Ainsi, toute la population juive fut exterminée, à l’exception de quelques-uns qui parvinrent à s’enfuir. La population tsigane de la ville subit le même sort.Après cela, les occupants entreprirent l’extermination de la population russe et ukrainienne. Sous prétexte de combattre les partisans et les communistes, les Allemands fusillèrent des civils innocents, dont beaucoup n’avaient jamais occupé de poste important ni participé activement aux affaires publiques. (…) »

Archives d’État de la Fédération de Russie, GARF 7021-72-2, p.61-62, document de la Commission Extraordinaire d’État soviétique, le 5 octobre 1943 in  Marie Moutier-Bitan …..

 

L’écoute d’un extrait de la série La Décision. À l’origine de l’extermination des Juifs d’Europe (ici) permet d’apporter les connaissances nécessaires à la compréhension du contexte.

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la décision  france culture

C. Quelle présentation de document ?  

L’utilisation des acronymes, tel DANS (date, auteur, nature, source) est d'une manière générale à proscrire. Elle conduit souvent à une répétition d'éléments du paratexte fourni par le manuel et conduit en certains cas à des contresens en ne traitant pas certains éléments primordiaux pour son compréhension, tels le ou les destinataires, le lieu d'élaboration du document, son contexte...

Cette étape de l’étude de document mérite une véritable mise en valeur. Elle contribue à la compréhension du document, en invitant à s’attarder sur un aspect significatif : l’identité et le parcours de l’auteur, le contexte d’énonciation ou encore la nature spécifique du document. Il s’agit d’inviter les élèves à donner sens à une grille de présentation parfois trop rigide, susceptible de passer sous silence certains éléments essentiels.

On peut, par exemple, inviter les élèves à sélectionner eux-mêmes les éléments de présentation qu’ils estiment les plus pertinents au regard du document étudié. La justification de ces choix permet d’engager une réflexion collective sur la fonction et la pertinence de chaque élément constitutif de la présentation. Cela suppose que l'élève dispose de connaissances préalables à l'étude du document, qui ne sert pas juste de prétexte à l'introduction de faits ou de notions.

Au final, quelques citères peuvent être définis pour l'étude critique de documents :

  • Les élèves disposent de connaissances préalables qui leur permettent d'appréhender le document.
  • La source est analysée, contextualisée, et ne fait pas l'objet d'une simple présentation.
  • un temps suffisant est accordé à ce travail d'analyse critique qui ne peut être mené en 10 ou 15 minutes.
  • les réponses des élèves juxtaposent informations du ou des documents et connaissances personnelles.


3. Des propositions en géographie et en histoire, en 6e, 5e et 4e

(6e) Proposition de mise en oeuvre en classe de Sixième | Introduction au commentaire de document | Le monde des cités grecques

(5e) Proposition de mise en oeuvre en classe de Cinquième |  Les guerres de religion en France, XVIe

(5e) Proposition de mise en oeuvre en classe de Cinquième | Les incendies dans l'Aude, causes, manifestations et conséquences

(4e) Proposition de mise en oeuvre - Mers et Océans : un monde maritimisé

 

(6e) Proposition de mise en oeuvre en classe de Sixième | Introduction au commentaire de document | Le monde des cités grecques

Périclès est un des hommes politiques les plus importants d’Athènes au Ve siècle av. J.-C, dominant la vie politique de la cité pendant plus de 30 ans. Réélu quinze fois stratège entre 443 et 429 av. J.-C., il remporte de nombreuses victoires, militaires comme diplomatiques. Il assure ainsi l'hégémonie d'Athènes sur le monde grec. Sa dernière action politique est de pousser les Athéniens à se lancer dans une guerre contre la cité de Sparte : c'est le début de la guerre du Péloponnèse (431-404 av. J.‑C.) qui se termine par la victoire de Sparte. Durant  la première année de la guerre du Péloponnèse, Périclès prononce un discours à l’occasion des funérailles des citoyens morts au combat.  Ce discours est rapporté par l’historien Thucydide dans son Histoire de la guerre du Péloponnèse; on ignore dans quelle mesure le texte qui nous est donné à lire correspond véritablement  à celui prononcé par Périclès.

" Ainsi ont lieu ces funérailles. [...] Quant à ces premiers morts, c’est Périclès, fils de Xanthippe, qui fut choisi pour parler d’eux. Et, au moment où les circonstances l’y invitaient, quittant le monument, il s’avança vers une haute tribune dressée pour qu’il fût entendu le plus loin possible par la foule, et il prononça, en substance, les paroles suivantes :
“Notre régime politique ne prend pas pour modèle les lois d’autres cités, et nous donnons l’exemple à suivre. C’est une démocratie car notre régime prend en compte les intérêts du plus grand nombre et non d’une minorité. La loi est la même pour tous, et ce n’est pas par la naissance ou la richesse qu’on obtient les fonctions, mais par le mérite. A l’inverse, la pauvreté n’empêche pas un homme qui en a les capacités de rendre service à la cité. La liberté est notre règle dans la façon dont on gouverne. [...] Enfin nous n'usons pas de ces humiliations qui, pour n'entraîner aucune perte matérielle, n'en sont pas moins douloureuses par le spectacle qu'elles donnent. La contrainte n'intervient pas dans nos relations particulières ; une crainte salutaire nous retient de transgresser les lois de la république ; nous obéissons toujours aux magistrats et aux lois et, parmi celles-ci, surtout à celles qui assurent la défense des opprimés et qui, tout en n'étant pas codifiées, impriment à celui qui les viole un mépris universel.
En outre pour dissiper tant de fatigues, nous avons ménagé à l'âme des délassements fort nombreux ; nous avons institué des jeux et des fêtes qui se succèdent d'un bout de l'année à l'autre, de merveilleux divertissements particuliers dont l'agrément journalier bannit la tristesse. L'importance de la cité y fait affluer toutes les ressources de la terre et nous jouissons aussi bien des productions de l'univers que de celles de notre pays. 
En ce qui concerne la guerre, voici en quoi nous différons de nos adversaires. Notre ville est ouverte à tous ; jamais nous n'usons de xénélasies pour écarter qui que ce soit d'une connaissance ou d'un spectacle, dont la révélation pourrait être profitable à nos ennemis. Nous fondons moins notre confiance sur les préparatifs et les ruses de guerre que sur notre propre courage au moment de l'action. En matière d'éducation, d'autres peuples, par un entraînement pénible, accoutument les enfants dès le tout jeune âge au courage viril ; mais nous, malgré notre genre de vie sans contrainte, nous affrontons avec autant de bravoure qu'eux des dangers semblables. En voici une preuve ; les Lacédémoniens, quand ils se mettent en campagne contre nous, n'opèrent pas seuls, mais avec tous leurs alliés ; nous, nous pénétrons seuls dans le territoire de nos voisins et très souvent nous n'avons pas trop de peine à triompher, en pays étranger, d'adversaires qui défendent leurs propres foyers.[...].
Nous savons concilier le goût du beau avec la simplicité, et le goût des études avec l’énergie. Nous usons de la richesse pour l’action et non pour une vaine parade en paroles. Chez nous, il n’est pas honteux d’avouer sa pauvreté ; il l’est bien davantage de ne pas chercher à l’éviter. Les mêmes hommes peuvent se consacrer à leurs affaires particulières et à celles de l’Etat ; les simples artisans peuvent entendre suffisamment les questions de politique. Seuls, nous considérons l’homme qui n’y participe pas comme un inutile. C’est par nous-mêmes que nous décidons des affaires, que nous nous en faisons un compte exact : pour nous, la parole n’est pas nuisible à l’action. […] Voilà donc en quoi nous nous distinguons : nous savons à la fois apporter de l’audace et de la réflexion dans nos entreprises. […] En un mot, je l’affirme, notre cité dans son ensemble est l’école de la Grèce. “

Discours de Périclès rapporté par Thucydide dans Histoire de la guerre du Péloponnèse, vers 400 av. J.-C.

 

Cette proposition s'insère au sein du thème 1 du programme d'Histoire de la classe de Sixième "Récits fondateurs, croyances et citoyenneté dans la Méditerranée antique au Ier millénaire avant J.-C."

 

Apprendre à commenter un document historique sans questionnaire : une démarche en deux temps en classe de 6ᵉ

 

Comment amener des élèves de 6ᵉ à analyser un document historique sans passer par le traditionnel questionnaire ?
Cette séquence a été conçue pour accompagner progressivement les élèves vers la pratique du commentaire de document, en leur donnant les outils pour lire, questionner et interpréter de manière autonome. L’objectif est de passer d’une lecture passive (“je cherche les réponses à un questionnaire”) à une lecture active et réflexive (“je cherche à comprendre le sens du document”).

 

La démarche se déroule en deux séances complémentaires : d’abord la découverte des idées-phares d’un texte, puis la création et la mise en jeu de questions élaborées par les élèves eux-mêmes.

 

🧭 Séance 1 - Identifier les idées-phare d’un document

Lors de cette première séance, les élèves découvrent la méthode du commentaire sans questionnaire, en repérant les idées dominantes du document afin de construire une grille de lecture thématique. 

 

Déroulement

  1. L'enseignant présente le document de manière explicite et relativement précise.

  2. L’enseignant lit à voix haute le document.

  3. Lecture active : les élèves relisent le document seuls; un véritable temps est consacré à cette deuxième lecture. Ils surlignent les mots qui leur semblent importants.

  4. Travail sur les idées-phares : chaque idée est associée à une couleur, créant des “grappes lexicales”.

 

L’objectif est d’encourager l’implication dans la tâche en offrant à l'élève la liberté de choisir sa propre approche du document. Plutôt que de risquer un découragement face à un nouveau questionnaire, l’apprentissage commence par cette autonomie de lecture. L’enjeu est de renforcer l’investissement dans l’étude du document en cultivant la confiance dans la capacité à maîtriser cet exercice. (Inspiré des travaux de R. Shankland, N. Dangouloff et D. Tessier, Stimuler l’envie d’apprendre – Du labo à la classe, Nathan, 2022.)

  1. Mise en commun : discussion collective argumentée et schématisation des grands axes du texte.

  2. Les élèves imaginent un titre pour le document.

 

Cette étape, à la fois méthodique et accessible, ancre une première compétence essentielle : comprendre le sens général du document avant de poursuivre la tâche d'analyse.

 

 

🧭 Séance 2 - Devenir auteur, autrice d'un questionnaire

Dans un jeu de rôle, la deuxième séance fait passer les élèves du statut de “lecteur” à celui de “professeur” : ils apprennent à formuler leurs propres questions, avant de les mettre à l’épreuve dans un jeu collectif.

 

Travail préparatoire

À la maison, chaque élève prépare cinq cartes :

  • Recto : une question sur le document.

  • Verso : sa réponse.

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Ce travail de conception incite chacun à penser la compréhension du texte.

 

En classe, déroulement :

  1. Mis dans le rôle d'un professeur qui cherche à construire une séance pour ses futures élèves de Sixième, les élèves, en groupe, mutualisent leurs cartes pour créer un questionnaire de quatre questions. Ils doivent justifier leurs choix afin d'évaluer la pertinence d'une question :

  • Pourquoi cette question est-elle importante ?

  • Que permet-elle de comprendre du document ?

 

  1. “Question-Défi” - Le jeu prend ensuite le relais :

  • Un groupe pose une question.

  • Le premier élève qui se lève répond pour son équipe.

  • Un autre groupe peut dire “Défi !” et proposer une meilleure réponse.

  • Le groupe questionneur arbitre ; l’enseignant valide ou complète.

(5e) Proposition de mise en oeuvre en classe de Cinquième |  Les guerres de religion en France, XVIe

A Toulouse, au printemps et à l’été 1572 notamment, les protestants sont emprisonnés. C’est dans les prisons, celle des Carmes et de l'Archevêché par exemple, explique l’historien Jérémie Foa, que les tueries commencent dans la nuit du 3 au 4 octobre 1572. A cela s’ajoute, rapidement, le pillage des maisons protestantes. Martial Mandac et Jehan Chabanet sont des commissaires de la mairie de Toulouse chargés d’aller de maison en maison afin de dresser la liste des biens des protestants survivants et de procéder à des confiscations le cas échéant. Le 2 décembre 1572, ils frappent à la porte de Guillaume Lezié.

“ Sommes allés à la maison de Guillaume Lezié, maistre tellatier* de Thoulouse, rue de Vinaigre, dans laquelle avons trouvé Anthoinette de Sesta, sa femme, laquelle interrogée moyennant serment, où estoit sondict mary.

A dict ne scavoir où est son mary à présent. Ce despartit il d’avec elle quinze jours devant les troubles, estant allé en ung arrentement** qu’il tenoit de madame du Faur.

Interrogée où sont les meubles qui lui feurent commandés par les precedans commissaires qui ont faict l’inventaire d’iceulx et faict commandement les nous exhiber.

Qu’a respondu qu’elle n’avoit autres meubles en sa puissance qu’un lict garny, lequel nous a exhibé. Et quant à une table de noyer, ung coffre et ung vieulx archelet  et autres de petite valleur, a dict appartenir à ung sien frere qui les luy avoit prestez voyant sa pauvreté.
Et voyant que ladicte de Sesta est bonne catholique, vivant soubz les constitutions de Saincte Mere Eglise Catholique romaine comme elle a toujours vescu, luy aurons layssé ledict lict pour s’en servir lequel et autres petis meubles de peu de valleur luy avons commandés les tenir soubs la main du roy et de la dicte court lui prohibant l’allienation.
Interrogée audict serment qu’elle a faict où sont tous les autres meubles de sondict mary et que sont devenuz.

A dict n’en avoir d’autres car lui furent pillés aux autres precedans troubles causant que sondict mary estoit de la dicte opinion***, elle ayant toujours vescu suyvant l’Eglise catholique romaine, à rayson de quoy en a esté battue et mal traicté de sondict mary. “

Archives municipales Toulouse, procès-verbal, GG 832, fol. 165 sq.in Jérémie Foa, Tous ceux qui tombent. Visages du massacre de la Saint-Barthélemy, La Découverte, 2021
 

*Un tellatier est un artisan du textile.

** L’arrentement est un contrat , une forme intermédiaire entre la location et la vente. (Le bénéficiaire d’un arrentement devait en payer annuellement un loyer et il pouvait disposer du bien comme un propriétaire aussi longtemps que la rente était payée.)

*** “De la dite opinion” expression péjorative qu’utilisent les catholiques pour signifier qu’ils ne considèrent pas le protestantisme comme une véritable religion.


Cette proposition s'insère au sein du thème 3 du programme de Géographie de la classe de Cinquième "Transformations de l’Europe et ouverture sur le monde aux XVIe et XVIIe siècles".
 

 

Une progression de compétences : comprendre → questionner → commenter

 

Cette séquence repose sur une progression en trois étapes : comprendre → questionner → commenter. À travers trois séances, les élèves découvrent comment lire, interroger et interpréter un document historique à partir d’une étude contextualisée : les massacres de la Saint-Barthélemy (1572).

 

🧭 Séance 1 - Jouer pour comprendre : les cartes-quiz

 

Travail préparatoire :

Avant la séance, les élèves lisent un article du magazine L’Histoire Junior (version papier ou numérique, ici). A partir de cette lecture, iIs créent six “cartes-quiz”. Les cartes-quiz sont de petites cartes, de la taille d’un jeu de 32 cartes. Sur le recto figure une question et sa réponse.

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En classe, déroulé :

  1. En classe, un temps de jeu est organisé par tables de quatre. Les cartes-quiz sont mises en commun; l'élève gagnant est celui ou celle qui collecte le plus de cartes en répondant correctement aux questions.

  2. L’enseignant distribue une fiche Vrai/Faux permettant de revenir sur les principales idées abordées.

Proposition de questionnaire

Cette dynamique ludique stimule l’engagement, la coopération et la réflexion sur le document comme sur la pertinence des questions.

 

  1. Lecture et contextualisation du document

    • Lecture à voix haute par l’enseignant puis lecture individuelle. Une version modernisée du texte peut être proposée dans une enveloppe d’aide pour les élèves qui le souhaitent.

    • Localisation du document sur une frise chronologique et/ou une carte du royaume de France.

 

 

🧭 Séance 2 - Confronter ses connaissances au document

L'objectif est ici d'apprendre à situer, présenter et annoter un document historique en mobilisant des connaissances acquises.

Déroulé:

 

  1. Présentation du document

  • On invite les élèves à sélectionner eux-mêmes les éléments de présentation qu’ils estiment les plus pertinents au regard du document étudié. La justification de ces choix permet d’engager une réflexion collective sur la fonction et la pertinence de chaque élément constitutif de la présentation. 

 

  1. Annotation active du document

  • Les élèves découpent les propositions “vraies” issues de la séance précédente (Vrai/Faux) et les collent en regard du texte pour faire correspondre preuves et affirmations.
    Exemple :
    “À Paris et ailleurs, il existe des milices locales qui surveillent, harcèlent et confisquent les biens des huguenots depuis plusieurs mois, plusieurs années. VRAI
    Elément à relier à la phrase correspondante dans le texte (" A dict n’en avoir d’autres car lui furent pillés aux autres precedans troubles [...]. " )

 

  1. Vers le commentaire de document 
    En binôme, les élèves surlignent :

  • en bleu le document confirme mes connaissances;

Les guerres de religion s’en prennent aux personnes mais aussi aux biens (confiscations).

 

  • en vert ce qui complète leurs connaissances;

Après les massacres de 1572 de l’été et du début de l’automne (4 oct. à Toulouse), la surveillance et le harcèlement des populations huguenotes se poursuit durant l’hiver (ici procès-verbal début déc.) .

La milice parle à la fois au nom du roi et du pouvoir municipal toulousain.

 

  • en rouge ce qui les contredit ou les interroge.

Il existait des formes de coexistence, de cohabitation entre catholiques et protestants: couple mixte interreligieux Antoinette - Guillaume. Mais Antoinette dit avoir été battue par son mari en raison de sa fidélité catholique : une coexistence impossible ou bien une manière de témoigner de sa bonne foi et ainsi pouvoir préserver ses quelques derniers biens ?
 

 

🧭 Séance 3 - Rédiger un développement pour expliquer une situation historique

 

✍️ Les élèves rédigent une paragraphe structuré à partir de la consigne suivante :

“À l’aide de vos connaissances et en vous appuyant sur l'étude du document, vous expliquerez les persécutions dont sont victimes les populations protestantes dans le royaume de France durant l’année 1572.”

 

(5e) Proposition de mise en oeuvre en classe de Cinquième | Les incendies dans l'Aude, causes, manifestations et conséquences

Cette proposition s'insère au sein du thème 3 du programme de géographie de la classe de cinquième " Thème 3 L’environnement, du local au planétaire.".

Pour cette question au programme de cinquième le programme précise " Le sous-thème 1 est traité à partir d’une étude de cas simple, des effets observés ou potentiels d’un changement climatique et d’une politique locale, régionale ou nationale, pour les éviter, les modérer ou s’y adapter."

Il s'agit ici de travailler, dans le cadre de la démarche critique d'étude de documents en collège, d'étudier les incendies survenus dans l'Aude à l'été 2025 et de différencier faits et arguments. Ce travail s'appuiera sur la mise en relation de deux documents, une image satellite Sentinel, et un texte composé à partir d'articles de presse.

Les objectifs sont sur le plan notionnel de comprendre les notions de risque, de vulnérabilité, d'adaptation et les effets du changement climatique sur un territoire local.

Sur les plan des savoir-faire, les objectifs sont pluriels. En terme de progression et nouveaux acquis, il s'agira d'apprendre aux élèves à lire une image satellite, différencier faits et arguments et confronter deux documents en suivant les axes préconisés par l'IGESR, en quoi les deux documents peuvent-ils se compléter ou se contredire.

Cette phase de démarche critique sera menée de manière simplifiée pour une classe de cinquième :

  • étape 1 : identifier les documents et notamment les spécificités de l'image satellite

  • étape 2 : savoir différencier des informations d'arguments explicatifs

  • étape 3 : mettre simplement en relation les deux documents pour voir s'ils se complètent ou contredisent.

Cette phase peut se dérouler sur une heure ou deux au choix, tandis que 3 à 4 heures peuvent être consacrées à l'étude cas, avant la mise en perspective à l'échelle mondiale.

 

Phase d'introduction de l'étude de cas

La séance pourra démarrer par un document d'accroche (extrait de journal télévisé, témoignage d'habitants..). La proposition est ici d'introduire l'image satellite par un avant/après de villages particulièrement frappés par les incendies comme Coustouge ou Jonquières dans un article du journal Sud Ouest (ici)

Il permet d'introduire l'étude de cas sur les incendies dans l'Aude par un discours du professeur qui les contextualise.

Le travail de localisation de cette étude de cas, indispensable, peut être mené à partir de cartes, de Géoportail ou d'une image satellite à l'échelle régionale

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Image satellite Aude

 

Elle permettra de poser des repères simples (localisation de l'Aude à l'échelle du pays, littoral méditerranéen, ville de Narbonne, milieu méditerranéen...).

Cette phase d'introduction amène à la problématique : Quel rôle joue le changement climatique dans les incendies de l'Aude à l'été 2025?

Démarche d'étude critique de documents

étape 1 : identifier les documents et notamment les spécificités de l'image satellite

La démarche d'étude critique de documents s'appuie sur deux sources :

  • Une image satellite Sentinel 2 du 11 août 2025

  • Un texte réalisé à partir d'extraits d'articles de presse

Document 1 : Image Sentinel-2 du 11 août 2025

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Incendie Aude image Sentinel en fausses couleurs

 

La phase de présentation du document est centrale ici car beaucoup d'élèves ne sont pas familiarisés avec les images satellite. Les démarches de présentation normatives (Nature, Auteur, Date...) sont à proscrire car un élève ne peut les mener avec ses connaissances. Le discours du professeur amènera plusieurs éléments nécessaires à la compréhension de ce document :

  • La nature du document doit être précisément établie : la couleur rouge est ici un code visuel, non la couleur réelle de la végétation. Les globes virtuels et applications courantes peuvent en effet entraîner une confusion entre photographie aérienne, image satellite et image numérique recomposée. Il est donc nécessaire d’expliquer simplement aux élèves de cinquième le principe d’une image satellite. Le satellite Sentinel-2, de la mission européenne Copernicus, tourne autour de la Terre en enregistrant la lumière réfléchie (visible ou invisible) par la surface dans différentes « bandes spectrales » (bleu, rouge, vert, infrarouge proche, infrarouge moyen…). Il ne s’agit pas d’une photographie au sens classique, mais d’une acquisition de signaux lumineux dans plusieurs longueurs d’onde, que l’on combine ensuite pour produire l’image.

    Pour cette image, le choix a été fait d’utiliser une composition colorée mettant en avant l’infrarouge proche, ce qui permet de distinguer la végétation en bonne santé (qui réfléchit fortement l’infrarouge) de la végétation brûlée ou dégradée (qui le réfléchit très peu). Ainsi :

    -   le rouge vif correspond à la végétation vivante et en bon état,

    -  le gris, brun ou vert terne correspond aux zones brûlées ou fortement altérées.

    Dans cette image Sentinel-2, les zones incendiées pouvaient être confondues, en teinte naturelle, avec des éléments du paysage comme un massif rocheux. Le recours à la bande infrarouge permet de lever cette ambiguïté et de mieux identifier les surfaces brûlées.

  • la date : Il peut être intéressant d'expliquer qu'il n'y a pas un satellite en permanence au dessus de toutes les zones. L'Aude a été balayée le 30/07/25 puis le 11/08/25. L'incendie du 06 août n'a pu donc être acquis en direct. Cela permet aussi de comparer aux deux dates.

  • L’auteur : Le logo du programme Copernicus de l’Union européenne apparaît explicitement sur l’image. On peut expliquer que Copernicus est un programme européen d’observation de la Terre, financé par l’Union européenne, et mis en œuvre par l’Agence spatiale européenne (ESA). Copernicus met à disposition du public des données gratuites et en libre accès, ce qui facilite leur utilisation pour l’enseignement, la recherche et les projets citoyens. D’autres satellites d’observation sont exploités par des opérateurs nationaux (comme le CNES en France ou Airbus pour le secteur industriel) ou par des agences internationales telles que la NASA.

     

  • La résolution : le téléchargement de l'image Sentinel-2 fournit une échelle. Cela permet d'introduire la notion de résolution. Celle du satellite Sentinel-2 pour cette bande proche infrarouge est de 10m. C'est à dire qu'un pixel sur l'image correspond à une surface de 10 mètres sur 10 mètres dans la réalité. Il faut bien comprendre qu'il existe donc deux échelles pour ce même document :

    - l’échelle liée à la résolution et à l’emprise de captation du satellite. Elle permet d’exercer un regard critique sur la pertinence de l’image satellite, au regard du phénomène géographique étudié. (par exemple : peut-on distinguer un cours d’eau ? des constructions ? un champ ? une parcelle brûlée ?).

    - l’échelle graphique figurant sur l’image. Elle permet à l’élève d’évaluer l’étendue spatiale du phénomène géographique.

Document 2 : Dossier de presse sur les incendies du 06 août 2025

" Le feu est parti vers 16H15 le 5 août de la commune de Ribaute, à une quarantaine de kilomètres à équidistance entre Narbonne et Carcassonne. Il s'est déclaré le long de la RD212 qui relie les villages de Lagrasse et Ribaute. Les "experts estiment qu'au regard des conditions de départ du feu, celui-ci pourrait avoir une cause criminelle. Malgré un dispositif "colossal" de plus de 2.000 pompiers, selon la préfecture, le massif des Corbières s'est embrasé "au grand galop": la zone parcourue par le feu est passée de 50 à 4.000 hectares en cinq heures, pour atteindre 16.000 hectares en à peine plus de 48 heures.

Sous l'effet conjugué de la tramontane, un vent sec et chaud, soufflant en rafales à 50 km/h, de la sécheresse, d'un taux d'humidité inférieur à 30%, de températures supérieures à 30°C, le feu a atteint "une vitesse de propagation de 1.000 hectares par heure".

Constitué de montagnes et de monts, le massif des Corbières, transition entre le Massif central et les Pyrénées, a un relief escarpé qui a pu, selon l'expert Serge Zaka, créer un "effet cheminée": l'air chaud monte rapidement, créant "un courant d'air vertical qui accélère la combustion et aspire les flammes vers le haut".

Ce type de relief crée, selon lui, une "inflammation plus précoce" et un "échauffement plus rapide" des végétaux, d'autant que les résineux et la garrigue des Corbières constituent déjà un combustible naturel puissant.

Article du site France 24 - 14/08/2025

 

Pour le moment, il faut faire attention aux surfaces qui sont données pendant les phases de propagation de l’incendie. Pour calculer la surface définitive touchée par les flammes, il faut tenir compte de ce qui est épargné au sein de cette enveloppe, grâce à des images satellites de bonne résolution.

Comment expliquer une telle vitesse de propagation ?

Depuis 2022, on observe une disponibilité de la végétation inédite dans ces secteurs. Cela signifie qu’il y a beaucoup de dépérissements, de la matière morte et sèche (bois, branches, arbustes), directement disponible pour la combustion de l’incendie.

Ce sont clairement les conséquences directes du changement climatique, qu'on anticipe depuis plusieurs années maintenant. Cette année, a eu des chaleurs extrêmement importantes dès le mois de juin dans les Pyrénées-Orientales et l'Aude, deux secteurs qui connaissent des sécheresses inédites depuis 2022.

Article du site Sciences & Avenir - 06/08/2025


Avec ses feuilles vertes et ses rangs bien espacés, la vigne se révèle en effet comme une barrière protectrice contre les incendies. "L'été, la vigne est en pleine croissance, avec du feuillage vert, composé à 80% d'eau, grâce à ses racines qui puisent très profondément dans le sol", explique Jean-Marc Touzard,spécialiste de la vigne. "Cela en fait un bon barrage contre les incendies, surtout si elle est bien entretenue et désherbée."

Au-delà de ces caractéristiques naturelles, la culture des vignes permet d'assurer une présence humaine utile lors des incendies. "Les viticulteurs jouent un rôle de prévention en avertissant des incendies et en entretenant des accès pour les pompiers".

Ces barrages naturels se font cependant de plus en plus rares. Depuis de longues années, l'Aude, et plus globalement le vignoble du Languedoc, traversent une grave crise climatique et économique. Avec les sécheresses qui se multiplient et qui durent parfois sur plusieurs années, et un marché français et international en berne, de nombreux viticulteurs n'arrivent plus à vivre de leur activité. Les vignes sont alors arrachées. Entre 2010 et 2020, 5 500 hectares ont ainsi été supprimés dans l'Aude, selon les services du ministère de l'Agriculture.

Article du site France info 08/08/2025


Pour réduire le risque [d'incendie], Karine Mirouze a adapté ses pratiques. Elle mise sur le pastoralisme. Son troupeau de brebis, accompagné de Cécilia, son ânesse, entretient les abords du domaine.

Cette démarche est soutenue par des aides européennes et départementales. Avec l’accompagnement de la Chambre d’agriculture de l'Aude, le domaine a débroussaillé et remis en culture des champs voisins. L'objectif est de créer des ceintures vertes, de véritables coupe-feu naturels.

Pour Margaux Lecroq, chargée de la défense contre les incendies à la Chambre d’agriculture de l’Aude, "les agriculteurs jouent un rôle de prévention par leurs pratiques. Ils maintiennent les espaces ouverts, entretiennent la biomasse. Ça limite l’expansion des grands incendies".

Article du site France 3 régions - 25/07/2025

Le document est téléchargeable en .pdf au format A4 ici

Le dossier de presse n'a pas vocation a être présenté, les élèves étant familiers de ce type de documents et les sources étant bien identifiées également.

étape 2 : savoir différencier des informations d'arguments explicatifs (ou causalités)

Le dossier de presse, est un peu plus long que ce que les élèves peuvent lire sur un manuel. C'est toute l'ambition de l'étude critique de documents, de limiter leur nombre au profit de l'approfondissement de l'analyse, tout en restant accessibles. Ce travail peut être mené de manière individuelle car il est au coeur de la séance, à savoir identifier des facteurs explicatifs de nature différente dans un texte et savoir les différencier d'une information simple.

Un travail de différenciation peut néanmoins être mené (organisation en travaux de groupes, suppression de certains passages, étayages pour s'approprier le texte...).

Durant cette étape les élèves vont lire le texte et à l'aide de deux couleurs différentes identifier ce qui relève des facteurs de vulnérabilité (en jaune) et ce qui relève des adaptations possibles (en vert).

Proposition de correction

étape 3 : mettre en relation les deux documents pour voir s'ils se complètent et en mesurer les limites

L'objectif de la séance étant l'initiation à la lecture d'une image satellite, il est conseillé de mener cette étape dans le cadre d'un cours dialogué afin de confronter rapidement hypothèses et solutions.

Il est possible de s'aider d'autres documents pour mieux effectuer les repérages sur l'image satellite comme l'utilisation de la fonctionnalité Street view de Google Maps, la couche carte topographique de Géoportail... afin de mieux identifier la fonction de certaines parcelles. Les données thématiques peuvent être pertinentes également : registres parcellaires graphiques ou couverture au sol par IA (2017-2020), lidar, réseau hydrographique….

Il va s'agir de montrer comment les deux documents peuvent se compléter dans un premier temps. Le deuxième temps sera consacré à montrer les limites d'un tel document, et ce qu'il ne peut dire.

Enfin des hypothèses peuvent également être amenée :

Les deux documents se complètent :

  • la végétation apparaît en effet plus sèche aux abords des zones brûlées (rouge moins vif) que dans les zones plus à l'écart de l'incendie

  • L'échelle témoigne de l'ampleur de l'incendie.

  • la vigne a clairement joué le rôle de coupe-feu aux alentours du village de Coustouge notamment.

  • le relief a facilité l'incendie

  • le pastoralisme ne semble pas présent sur cette zone

  • L'incendie n'est pas uniforme et des parcelles ont résisté au milieu de la zone brûlée

 

La comparaison des deux documents montre les limites de l'image satellite :

  • Une image satellite à une date antérieure permettrait de mesurer si la vigne a disparu ainsi que l'assèchement possible de végétation et la création de biomasse.

  • Ce satellite n'est pas un satellite météo, qui permettrait d'analyser les conditions climatiques au moment de l'incendie en comparaison des années précédentes.

  • L'échelle ne permet pas une analyse des dégâts, il conviendrait d'avoir une meilleure résolution d'image.

Enfin des hypothèses peuvent être posées :

  • la présence de voies de circulation (départementales) semble avoir favorisé la lutte contre l'incendie

  • La forêt domaniale (appartenant à l'Etat) ne semble pas avoir brûlé, est-elle mieux entretenue?

A l'issue de ce travail, la fixation des connaissances acquises peut prendre plusieurs formes comme une trace écrite, un croquis, un schéma fléché...

Nous avons choisi ici de légender l'image satellite afin de favoriser une trace écrite sous forme graphique et spatialisée.

Image
Image Sentinel corrigée

Le fichier vierge au format .pdf pour faire travailler les élèves est disponible ici

 

(4e) Proposition de mise en oeuvre - Mers et Océans : un monde maritimisé

Cette proposition s'insère au sein du thème 3 du programme de géographie de la classe de quatrième "Des espaces transformés par la mondialisation", sous-thème 1 " Mers et Océans : un monde maritimisé".

Cette activité d'étude critique de documents se positionne plutôt en fin de chapitre lorsque les élèves ont acquis les notions de route maritime notamment. Il s'agit de montrer comment " les mers et les océans sont [...] au centre de conflits d’intérêts nombreux." d'après les programmes.

Comme rappelé dans l'introduction de l'article, il s'agit d'articuler trois éléments : les deux documents et des connaissances. Deux verbes d’action éclairent alors les deux situations possibles : les deux documents se complètent ou les deux documents se contredisent..

Cette démarche s'inscrit dans la progressivité de l'étude critique de documents menée jusqu'au lycée. Les élèves de collège sont ici guidés par des questions afin d'accomplir chacune des étapes.

Deux cartes sont ici confrontées. La première est  extraite d'un article des Décodeurs du Monde datant de 2017 :

https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/visuel/2017/02/20/la-chine-se-cartographie-comme-le-nombril-du-monde_5082283_4355770.html

La seconde est extraite d'un article de Géoconfluences, écrit par Catherine Biaggi et Laurent Carroué " Les grands détroits et canaux internationaux dans la géopolitique des mers et océans, un système très hiérarchisé sous tensions multiformes " datant de 2024 :

https://geoconfluences.ens-lyon.fr/informations-scientifiques/dossiers-thematiques/oceans-et-mondialisation/articles-scientifiques/passages-strategiques-maritimes-ppo-geopolitique

Document 1 : carte chinoise adoptée par l’Administration arctique et antarctique chinoise, chargée entre autres d’assurer les expéditions polaires. Adaptée par les Décodeurs du Monde (2017 - 2019)

Image
Carte Chine projection Xiaoguang

 

Document 2 : La fréquentation des passages maritimes stratégiques et types de cargaison - Géoconfluences (2024)

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Carte passages stratégiques

 

Activité :

La démarche des élèves s'appuie sur 3 étapes :

1) Identifier les points communs entre les deux documents

2) Identifier les différences entre les deux documents

3) Expliquer à l'aide des connaissances et des documents les différences en utilisant le code couleur suivant (surlignage) :

  • en jaune informations du document 1

  • en vert informations du document 2

  • en bleu connaissances

La présentation des documents est volontairement laissée de côté car l'identification de leurs caractéristiques fait pleinement partie du questionnement et du raisonnement.

Néanmoins, pour appréhender le premier document, réalisé selon la projection de Hao Xiaoguang, les élèves sont invités à écouter un extrait de l'émission Méridiens, planisphères : la fabrique du centre du monde sur France Culture avec l'intervention de Fabrice Argounès, géographe (extrait de 20:58 à 23:33).

https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/cultures-monde/meridiens-planispheres-la-fabrique-du-centre-du-monde-3039802

Image
Podcast cartes maîtresses

 

1) Pour répondre à la question 1, les élèves peuvent identifier :

  • la présence dans les deux documents des grandes routes maritimes mondiales dont la route conteneurisée est-ouest. Les deux documents se complètent.

  • l'existence de lieux de passages stratégiques (Détroit de Malacca, Canal de Suez...)

  • les deux documents marginalisent l'Amérique et les Etats-Unis dans le commerce maritime mondial (quasi absents du document 1 sauf pour New-York, rang 14 sur 16 pour le canal de Panama dans le document 2)

2) Pour les différences, de nombreuses réponses, au-delà des informations propres à chaque carte, peuvent être proposées. Les informations majeures qui peuvent être identifiées sont :

  • La différence de projection de chacun des planisphère qui place l'un la Chine au centre, l'autre l'Europe

  • La place majeure de l'Arctique et de l'Antarctique dans le trafic maritime mondial sur la carte 1

  • La place périphérique de l'Europe au profit de la mer de Chine méridionale et de l'Océan indien.

3) C'est dans cette troisième partie que l'étude critique de documents prend sa pleine mesure car les élèves vont être amenés à rédiger quelques phrases articulant les informations des deux documents, leurs connaissances, avec des verbes d'action.

Dans un souci de progressivité et de différenciation, certains élèves peuvent commencer à rédiger un paragraphe pour commencer et appréhender l'exercice. Le professeur peut aussi illustrer cette démarche au tableau en réalisant le premier paragraphe.

Les réponses ci-dessous ne sont qu'un exemple parmi tant d'autres. L'important est la démarche d'étude critique où l'élève articule les informations des deux documents et des connaissances, afin d'émettre un point de vue critique.

Image
4eme surligne

Bibliographie - sitographie  : 

Argounès, Fabrice, Méridiens. Mesurer, partager, dominer le monde, CNRS éditions, août 2025.

Biaggi Catherine, Carroué Laurent, Les grands détroits et canaux internationaux dans la géopolitique des mers et océans, un système très hiérarchisé sous tensions multiformes, Géoconfluences, juin 2024.

Méridiens, planisphères : la fabrique du centre du monde, Cultures Monde, France Culture, septembre 2025.

 

 

Illustration de couverture sous licence Creative Commons

https://www.flickr.com/photos/bibliotheque-leschampslibres-rennes/12301507923/