poes'IA : Revisiter les cartes postales sonores grâce aux ia génératives
Comment l’IA générative d’images arrive-t-elle à accompagner le travail poétique ? Quels défauts ou quels biais la génération d’image permet-elle d’observer ?
Présentation de l'activité
Objectif littéraire et didactique :
- Utiliser l’intelligence artificielle pour relancer l’engagement et la créativité, aller vers la création d’une oeuvre autonome, guidée par le texte de l’élève.
- Utiliser l’intelligence artificielle générative d’image pour faire travailler l’analyse picturale, en tenant compte de la particularité de l’image générée artificiellement à partir du texte d’élève.
- Attribuer une dimension réflexive et critique au travail de l’élève, tant sur son propre travail que sur celui de l’IA.
Problématique de la séquence : Description, impression, révélation : qu’apporte l’art poétique à la vision des paysages ?
Objet d’étude : imaginer des univers nouveaux
Niveau : 5eme
Introduction
Lors d’une séquence menée en janvier 2025, nous avons expérimenté la génération d’images à partir du site Vittasciences, auprès de deux groupes de besoins en classe de 5eme.
La séquence avait pour thème le paysage poétique (regarder la monde, inventer des mondes). Les principales compétences évaluées furent la production d’écrits poétiques, la lecture expressive et l’enrichissement sonore de son propre texte, ainsi que l’analyse d’image. Le tout concourant au projet suivant : produire une carte postale sonore, dont le script génèrerait lui-même une nouvelle image, par l’intelligence artificielle. Au coeur de notre questionnement : l’IA parvient-elle à générer notre paysage rêvé, notre paysage poétique ? Quelles différences entre la paysage poétique et la simple description ?
Ecrire à partir d’un paysage personnel
Le premier temps de la séquence fut celui d’une première réception à partir d’une image. Les élèves ont apporté à la rentrée des vacances de noël une image de paysage qui devait résonner pour eux : paysage traversé, rêvé, vue d’une fenêtre, ...
La première séance fut ainsi l’occasion de décrire les images rapportées, et de mettre en mot les impressions, ou les émotions qu’elles provoquent chez l’élève.
Ce premier écrit étant amené à être amendé, nous avons utilisé la technique du grand brouillon : sur un support A3, les élèves ont écrit dans la partie centrale.
Nourrir pour enrichir : vers un paysage poétique
Les séances suivantes, mêlant lectures, écriture et points de langue, ont vu le texte se transformer petit à petit en poème, par un processus d’innutrition et d’acculturation. Par exemple, les élèves ont découvert les liens entre paysage et état d’âme, ont repris des procédés comme la personnification du paysage, ont écrit en première personne en se mettant en scène dans le lieu présenté. Un rituel d’écriture a été mis en place pour créer en parallèle une boîte à outil poétique : création d’images par croisement de champs lexicaux, travail sur le pôle matériel d’un mot, bout-rimé.
Le retour au texte sur le grand brouillon s'est fait régulièrement, par des ajouts ou des modifications diverses : stylistiques, énonciatives, grammaticales. Il a donné lieu, lors d’une réécriture finale, à la production d’un texte poétique intégrant diverses contraintes.
Génération d’images grâce à l’IAG, à partir des textes d’élèves
La suite du projet sur le papier ? Enregistrer les textes, les enrichir grâce au logiciel de montage sonore Audacity, puis afficher les bandes-sons en vis-à-vis des images.
Excepté que l’intelligence artificielle générative d’image a permis d’engager un travail doublement stimulant avec les élèves, en lieu et place d’une simple collecte des paysages apportés en début de séquence.
Ainsi, ce sont les poèmes qui ont a leur tour permis de générer un paysage, une fois saisis par l’enseignant sur le site Vittasciences. Le travail poétique a connu de fait un rebond créatif, qui a relancé l’engagement des élèves. Parfois surpris, amusés, voire admiratifs de l’image produite à partir de leur texte. Paradoxalement, la génération d’une “oeuvre” dérivée leur fait prendre conscience du caractère original, voire artistique, de l’écrit scolaire. Certains se sont par exemple montrés vexés par le non-respect de certaines propriétés de leur texte par l’IA.
Analyse des productions des IAG
Par ailleurs, il nous a semblé important de ne pas utiliser l’IA seulement dans sa dimension créative. Nous avons remarqué, en les générant et en écoutant les retours des élèves, que les images comportaient de nombreuses erreurs ou approximations : métaphores prises au pied de la lettre, ajout d’éléments totalement absents du texte source, ou à l’inverse oublis d’éléments structurants, comme par exemple une fenêtre circonscrivant le regard du jeune poète.
Une fois le support final rendu aux élèves, ceux-ci ont analysé les liens et les dissonances entre leur texte et leur image. Considérant leurs textes cette fois comme des instructions à destination de l’IA (des prompts), il leur a été plus simple de qualifier ce qui était fidèle ou non. Le croisement des analyses a finalement permis d’opérer des recoupements et de faire émerger des erreurs types de l’IA générative : hallucination, oubli/conflit, ajout arbitraire.
Un prolongement aurait été possible, en faisant manipuler l’IA par les élèves. En effet, le site vittasciences ne nécessite pas d’inscription et a une visée pédagogique-qui ne se limite d’ailleurs pas à l’intelligence artificielle.
Prolongement possible : du poème au prompt
Ainsi, il peut être fécond de demander aux élèves de passer du poème au prompt, de façon à générer une image conforme à leurs attentes, à leurs impressions ou à leurs ressentis de départ. Nous voyons là un premier pas vers une utilisation raisonnée de l’IA, par un travail humain de formulation et d’ajustement rendu nécessaire.